Le Trieb de Freud, de la pulsion au mythe. I

mardi 5 mai 2015
par  P. Valas

Chapitre I : Le Trieb de Freud. Un préalable à l’étude clinique sérielle des structures freudiennes de la perversion dans l’enseignement de Lacan.

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Le Trieb de Freud :
 

*Du mythe de la pulsion au réel de la jouissance.

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Le Trieb de Freud,de la pulsion au mythe. I

CHAPITRE I : AVEC FREUD

Dans l’œuvre de Freud

On sait le prix qu’attachaient Freud et Lacan à ce que l’on appelle la culture humaniste.

Celle-ci repose sur le développement de ce qui existait depuis l’antiquité, à savoir les arts de
la langue :

Grammaire, philologie, traduction, histoire, etc.

Depuis le 19e siècle il existe un discours qui se présente comme une science du langage
engageant autres choses que les arts et les techniques de science.

Freud pour sa part, marque très peu d’intérêt pour la méthode de la linguistique scientifique.

On note une ignorance presque systématique pour la grammaire comparée, pourtant en plein
essor en son temps et qui étudiait tout spécialement les langues classiques qui le passionnaient

En revanche il marque un grand intérêt pour certaines propriétés du langage - exemple
célèbre entre tous Le sens opposé des mots originaires, censés pouvoir témoigner de certaines
propriétés des processus inconscients :

Il publie ce texte en 1910. Dans sa version en français il se trouve dans le livre L’inquiétante
étrangeté et autre essais à la page 50.

Freud veut expliquer comment dans le rêve on ne trouve pas de contradiction, le rêve pouvant
exprimer un désir par son sens opposé.

Il y a des mots dont la racine originaire peut contenir deux sens opposés. Pour cette étude
Freud s’inspire des travaux d’Abel.

Par exemple dans la langue allemande le mot strâk signifie aussi bien fort que faible.
Le mot lichte signifie lumière à Berlin, mais obscurité à Munich. A Berlin le mot hier peut
signifier bière mais aussi bien eau.

En latin, altus signifie à la fois haut et profond. Si on caractérise un puits par ce mot on entend bien que son sens est changé.

En égyptien le mot ken exprime à la fois la force et la faiblesse. Si on veut dire fort, on
accompagne le terme d’un hiéroglyphe représentant un homme debout, pour dire faible le
hiéroglyphe représente un homme accroupi.

Le rêve peut donc exprimer les pensées du sujet par le même mot qui a des sens opposés mais
exprimant la même signification du désir.

Freud souligne les choses ainsi :

« Dans la concordance que nous avons soulignée d’emblée entre la particularité du rêve et la
pratique des langues les plus anciennes mise enjeu par la linguistique, nous sommes autorisés
à apercevoir une confirmation de notre conception du caractère régressif et archaïque de la
pensée dans les rêves, et à nous s’impose comme une présomption impossible à écarter l’idée
que nous comprendrions mieux et que nous traduirions plus aisément la langue du rêve si
nous en savions plus sur l’évolution de la langue. »

Lacan proclame un grand intérêt pour la linguistique sous sa forme post-saussurienne dans sa version structuraliste.

Lacan s’il proclame un grand intérêt pour la linguistique sous sa forme post saussurienne
dans sa version structuraliste, il n’utilise pas ses méthodes propres : commutations, paires
minimales, traits distinctifs etc. Il s’intéresse seulement au fait général que le langage a des
propriétés établies par la linguistique et il s’en sert.

Pour autant que puisqu’il est démontré qu’un langage a des propriétés de structure,
l’inconscient a les mêmes propriétés.

C’est ce que signifie l’axiome lacanien « L’inconscient est structuré comme un langage ».

Il faut souligner que si ces propriétés structurales du langage n’étaient pas spécifiques, il n’y
aurait aucun intérêt à caractériser l’inconscient de cette façon.

Je suis parti de "La Troisième" pour montrer quel virage cette intervention représentait dans l’enseignement de Lacan.

Je suis parti de La Troisième pour montrer quel virage cette intervention représentait dans l’enseignement de Lacan, compte tenu que la structure ternaire constituée par le nouage borroméen du Réel, de l’Imaginaire et du Symbolique qui va au-delà des propriétés stricto sensu du langage.

La notion de discours représente un extrême dans l’usage de la structure qui peut se déduire de la logique du signifiant.

J’ai consacré aussi quelques séances à la notion de discours qui représentent un extrême dans
l’usage de la structure qui peut se déduire de la logique du signifiant.

Ce qui justifie Lacan à introduire son axiome "l’inconscient est structuré comme un langage" pour relire le texte de Freud avec cet éclairage.

Il me faut revenir encore en arrière, pour montrer ce qui justifie Lacan à introduire son axiome l’inconscient est structuré comme un langage pour relire le texte de Freud avec cet éclairage.

J’aurai pu passer par d’autres voies, mais j’ai choisi de partir de ce qui m’en a semblé le plus éloigné, la théorie des pulsions. L’étude suivante se fera sous l’intitulé :

Du mythe de la pulsion au réel de la jouissance.

Le terme de pulsion (Trieb en allemand) a un long passé non seulement en psychologie, mais aussi en physiologie et en physique.

Lorsque Freud le reprendra (car il utilise rarement l’autre mot qui a une racine latine instink) il va le spécifier d’une telle façon qu’il appartient désormais à la psychanalyse.

Les significations du terme de pulsion dans les autres domaines en seront effacées.

Ses significations dans les autres domaines en seront effacées. Pour nous, en 2010, ce terme de pulsion a tellement été recouvert de griffonnages diversement extravagants, tant dans la littérature analytique que dans le discours courant, que l’on n’arrive plus très bien à en retrouver le sens originel chez Freud, où sa définition est déjà difficile à cerner.

On en vient le plus souvent à confondre la pulsion avec une vague poussée libidineuse, plus ou moins glauque, saisissant l’individu et le conduisant à commettre des actes incontrôlés à coloration sexuelle. C’est même au point que devant les tribunaux, si la défense arrive a étayer l’idée que l’inculpé à commis son forfait sous l’emprise d’une pulsion immaîtrisable, surgie des profondeurs de son archaïsme animal, il pourra à l’occasion parfois bénéficier de certaines circonstances atténuantes.

La pulsion chez Freud :

Freud précise au départ que son expérience est indépendante de toute recherche biologique, cependant il espère pouvoir y intervenir, jusqu’à devoir y renoncer. C’est un point qui doit attirer notre attention, parce que Freud entend concevoir la théorie analytique sur le modèle de la formalisation scientifique de son temps. Autrement dit, darwinien affirmé, il souhaite pouvoir intégrer la psychanalyse dans le champ sinon biologique, au moins en corrélation avec l’évolutionnisme.

Freud publie en 1905 "Les trois essais sur la théorie de la sexualité".

Ce livre princeps sera réédité à plusieurs fois sur une période de près de 20 ans, la dernière édition datant de 1924. Comme à son habitude, Freud apportera à son ouvrage des corrections nombreuses à l’édition première, en y intégrant des notes pour tenir compte des modifications nécessitées par L’introduction au narcissisme (1914), La métapsychologie (1915), L’au-delà du principe de plaisir (1920), La seconde topique (1923) et enfin Le problème économique du masochisme (1924).

Il commence d’abord par prendre l’opinion la plus couramment répandue et reconnue de son
temps sur les questions qu’il traite, pour les soumettre à l’épreuve des faits de son expérience
clinique :

La tendance sexuelle, la pulsion sexuelle, telle qu’elle se manifeste chez les humains permet
de définir deux pôles où s’exerce son activité.

— D’une part son objet, c’est-à-dire le partenaire sexuel exerçant son attrait sur l’individu. A l’époque l’objet sexuel c’est la femme, la qualifier d’objet n’avait pas la connotation péjorative que ce terme a aujourd’hui, depuis les premières décennies du 20o siècle.

— D’autre part son but qui doit aboutir à l’acte sexuel, c’est-à-dire normalement à la conjonction des organes génitaux dans le coït.

Or Freud rend compte qu’aussi bien chez les sujets dits normaux, que chez les pervers, on constate qu’au-delà de son but proprement biologique dans la reproduction, la sexualité humaine présente toutes sortes de fantaisies dans sa pratique courante.

Quant au but sexuel même, toutes les déviations sont possibles pour parvenir à la satisfaction.

L’objet sexuel n’est pas spécifique et de plus il est interchangeable, ce qui le distingue de l’objet d’amour. Quant au but sexuel même, toutes les déviations sont possibles pour parvenir à la satisfaction.

Freud élimine toute dégénérescence organiques congénitales ou acquises dans la causalité de ce qu’il appelle les déviations quant à l’objet et au but.

Freud est dans l’embarras pour définir la perversion.

Ce polymorphisme extraordinaire des manifestations de la sexualité chez l’homme, comme le fait qu’on peut les rencontrer chez tout le monde, le mettent dans l’embarras pour définir la perversion.

Il finit par conclure qu’au-delà de certaines manifestations à considérer comme pathologiques, la nécrophilie par exemple, on ne peut distinguer la perversion de la norme, que parce que chez le pervers, il y a une fixation prévalente, voire exclusive quant à l’objet et au but, par rapport au primat du génital.

Il va même jusqu’à préciser que même dans les manifestations les plus « répugnantes » de la sexualité (il cite la coprophagie et la nécrophilie) l’amour peut s’y révéler dans ses formes les plus exaltantes. Preuve supplémentaire qu’il s’agit aussi dans ces cas d’un mode de vie psychiques.

Freud écarte la tarte à la crème des déviances dégénératives congénitales ou acquise, comme la syphilis qu’on associait pratiquement à toute «  bizarreries » en son temps.

Cela dit afin d’écarter la tarte à la crème des déviances dégénératives congénitales ou acquise, comme la syphilis qu’on associait pratiquement à toute « bizarreries » en son temps.

Cela amène Freud à conclure que la pulsion sexuelle n’est pas une donnée simple.

On voit donc chez lui moins émerger la conception d’une maturation linéaire et unitaire de la sexualité sous le primat du génital que l’idée d’un polymorphisme de la sexualité par dissociation de ce qu’il désigne déjà du terme de pulsion partielle.

Au fond le premier scandale soulevé par ce livre n’est pas tant ce polymorphisme des manifestations sexuelles révélées par la psychanalyse, on s’en doutait quand même depuis longtemps chez les gens un peu ouverts, malgré les efforts conjugués de la science et de la religion.

Plus dérangeante est la thèse que les psychonévroses s’origineraient dans les troubles de la sexualité.

Le véritable scandale, celui que l’on ne pardonne pas à Freud c’est d’affirmer que tout un chacun, normal ou névrosé est toujours en difficulté avec sa sexualité.

Mais le véritable scandale, celui que l’on ne pardonne pas à Freud c’est d’affirmer que tout un chacun, normal ou névrosé est toujours en difficulté avec sa sexualité.

En somme Freud annonce au monde qu’il n’y a pas de normes sexuelles, ce à quoi tentent de parer les normes sociales.

En somme Freud annonce au monde qu’il n’y a pas de normes sexuelles, ce à quoi tentent de parer les normes sociales - n’oublions pas que les philosophes avaient renvoyé le désir sexuel aux oubliettes, car il était inclassable dans leurs catégories.

A lire Freud avec attention ce qu’il tient pour normal, et sur ce point il est intraitable, ne relève pas du conformisme historique, culturel ou religieux, mais essentiellement de ce qui se conjoint à l’œdipe et que l’on méconnaît le plus souvent, faute d’avoir bien compris ce qu’il dit aussi dans Totem et Tabou, il y a l’interdit de l’inceste bien sûr, mais pas sans son corollaire les lois de l’exogamie.

Voilà pour lui pourquoi la fonction principale et normale de la vie sexuelle est d’abord d’être au service de la reproduction de l’espèce.

Freud : Par pulsion "nous désignons le représentant psychique d’une source continue d’excitation venant de l’intérieur de l’organisme"

Freud va alors préciser ce qu’il entend définir du terme de pulsion partielle : Par pulsion « nous désignons le représentant psychique d’une source continue d’excitation venant de l’intérieur de l’organisme".

— Il la distingue donc radicalement de l’excitation extérieure qui elle est discontinue.

— Il situe la pulsion à la limite des domaines psychiques et physiques en distinguant les pulsions en fonction de leur source située dans un organe et leur but le plus prochain comme étant l’apaisement d’une telle excitation organique.

Le plus important est que l’excitation endogène est spécifiquement sexuelle, l’organe correspondant étant défini comme la zone érogène d’où s’origine la pulsion.

Les zones érogènes fonctionnent comme appartenant à ce que Freud appelle l’appareil génital secondaire.

Elles sont le siège d’excitation et de processus comparables à l’érection des organes génitaux et peuvent se substituer à lui.

On peut saisir ici que le modèle est pris en référence à l’organe mâle, ce qui aura une incidence prévalente sur la conception qu’il se fait de la pulsion et de sa fonction dans les phénomènes de tension et d’apaisement de la tension.

Dans le chapitre de ces Essais consacrés aux théories sexuelles infantiles, Freud provoque un nouveau scandale en révélant que les enfants ont aussi une vie sexuelle.

Freud provoque un nouveau scandale en révélant que les enfants ont aussi une vie sexuelle.

Il démontre comment chez l’enfant la pulsion s’étaye sur les fonctions des besoins organiques pour s’en séparer par la suite.

Cela passe par la voie d’une érotisation de l’activité liée à la satisfaction de ses besoins dans sa relation à l’adulte qui prend soin de lui.

En somme dans un premier temps l’apaisement d’un de ses besoins sera en rapport avec l’organe mis enjeu dont la satisfaction en fera une zone érogène.

Il est important de rappeler ici que Freud découvre la sexualité de l’enfant à travers les récits que lui font des adultes en analyse.

Ce n’est que plus tard qu’il demandera à certains de ses élèves, dont le père du petit Hans, de lui apporter des observations prises sur le vif de la vie quotidienne de l’enfant - ces observations venant confirmer le bien fondé de ses thèses.

Pour Freud le développement de la sexualité de l’enfant va suivre l’ordre de maturation du corps selon la linéarité qui va du prégénital au génital.

Le développement de la sexualité de l’enfant va suivre l’ordre de maturation du corps selon la linéarité qui va du prégénital au génital.

Mais une fois de plus les traductions de Freud en français sont trompeuses.

Freud en effet pose avant tout le principe du primat de l’assomption phallique, qui va faire de la possession ou non du phallus l’élément différentiel primordial dans lequel l’organisation génitale des sexes s’oppose.

Autrement dit alors que les traductions fourmillent d’erreurs, Freud ne s’y trompe pas. Le phallus n’est pas à confondre avec l’organe, sinon on ne peut pas comprendre que Freud use du mythe œdipien et du complexe de castration pour rendre compte de ce que signifie l’assomption du phallus dont se détermine l’identité sexuée pour la fille comme pour le garçon, il en résulte pour chacun une position différente mais qui est relativement indépendante du sexe anatomique.

Le prégénital chez l’enfant ne fait que désigner ce temps logique premier où les pulsions ne seraient pas polarisées par le génital.

L’enfant est un « pervers polymorphe » écrit Freud, sans pour autant en faire un pervers dont la structure subjective est autrement organisée.

La vie sexuelle de l’enfant est donc organisée sur le mode des pulsions partielles.

L’enfant est un « pervers polymorphe » écrit Freud, sans pour autant en faire un pervers dont la structure subjective est autrement organisée.

D’ailleurs Freud fait souvent usage pour désigner la sexualité comme étant plutôt à « disposition perverse », ce qui ouvre à son développement la potentialité d’un avenir des plus variés.

on orientation définitive se faisant après la résolution de la phase phallique, la constitution et le choix de l’objet.

Le prétendu auto-érotisme de l’enfant est à entendre autrement.

Après la période de latence, viendra la puberté puis l’adolescence où la maturation sexuelle trouvera son achèvement.

Freud réfutera sa thèse première que le choix de l’objet est tardif, mais au contraire se fait très précocement, il en résulte que le prétendu auto-érotisme de l’enfant est à entendre autrement.

Non pas que l’enfant n’a pas encore fait son choix d’objet, mais qu’il entretient avec ses objets essentiellement une relation de plaisir.

Non pas que l’enfant n’a pas encore fait son choix d’objet, mais qu’il entretient avec ses objets essentiellement une relation de plaisir.

La mise au jour de la sexualité de l’enfant et la part très active qu’il y prend va avoir une importance capitale pour Freud.

En effet il est en train d’abandonner sa théorie du trauma de la séduction à l’origine des névroses, au profit de la théorie du fantasme qui donne son sens et sa valeur à « la scène primitive » plutôt fomentée par l’enfant que par sa réalité, qui bien sûr n’est pas toujours à exclure.

Après le cas Dora publié en 1905 où la notion de trauma est au premier plan, le point tournant est celui de L’homme aux loups, mais où Freud hésite encore à se contenter des coordonnées symbolique du rêve à répétition pour débusquer un trauma réel s’originant dans la vision du coït à tergo des parents par l’enfant.

La position définitive de Freud en faveur de la causalité du fantasme

La position définitive de Freud en faveur de la causalité du fantasme sera confirmée par l’analyse du fantasme On bat un enfant en 1920.

Freud y démontre, par l’analyse logique de ce fantasme, la part active que prend l’enfant dans l’interprétation de son parcours œdipien.

La suite des Essais va être une longue étude sur les phénomènes de tension et d’excitation sexuelle, avec ses effets de plaisir et de déplaisir. Comme cela sera repris plus tard je le laisse de côté pour ne pas me répéter.

La théorie de la libido.

La fin des Essais est coiffée par la théorie de la libido. En faite elle n’est pas contemporaine des Essais puisqu’elle est élaborée après L’introduction au narcissisme publiée en 1914.

Freud parle de cette libido comme d’une spéculation nécessaire à son raisonnement.
Il va la remanier en fonction de ses avancées, si bien qu’elle reste une notion difficile à saisir, mais il en a besoin pour tenter d’articuler le champ du fonctionnement des pulsions partielles.

En effet, bien que leurs activités sont indépendantes les unes des autres elles s’interchangent réciproquement lorsque pour une raison quelconque la satisfaction recherchée par l’une d’elle ne peut pas être obtenue.

La libido est une notion de force possédant une énergie quantitative et surtout qualitative. Elle intervient dans le choix de l’objet. Sa polarité est sexuelle, et en la qualifiant ainsi Freud se sépare définitivement de Jung qui fait de la libido un intérêt psychique général du sujet pour le monde.

La libido est donc un véritable fluide mythique.

La libido est donc un véritable fluide mythique se répartissant entre les pulsions selon le principe des vases communicants, expliquant ainsi le passage de l’une aux autres.

Ses investissements sur les objets, ses déplacements réversibles entre le moi et les objets ne peuvent s’expliquer que parce qu’elle fonctionne dans le cadre du narcissisme.

La libido est affirmée par Freud comme d’essence mâle, pour autant que la sexualité s’organise sous le primat du phallus, il en est ainsi parce que l’ordre du discours l’impose.

La trouvaille de l’objet et de son choix électif par le sujet.

Enfin Freud va donner une précision supplémentaire quant à la trouvaille de l’objet et de son choix électif par le sujet. En effet il ne s’agit que d’une retrouvaille d’un objet nouveau au regard de l’objet premier et perdu à jamais, mais dont le sujet conserve les coordonnées de plaisir qui ont constituées ses premières expériences et dont la mémoire est fixée dans les traces mnésiques constitutives de l’inconscient.

Pour résumer ces Trois Essais sur la théorie de la sexualité :

- 1. — Il n’y a pas de pulsion sexuelle totalisante et mature. Même si la sexualité de l’enfant à l’adulte est soumise au primat du phallus, elle se manifeste sous la forme de pulsions partielles.

- 2. — La pulsion est le représentant psychique de la sexualité.

- 3. — La pulsion est à disposition perverse, mais elle n’est pas à confondre avec la perversion qui est une position subjective autrement disposée.

- 4. — Pour Freud la pulsion est un concept limite entre le psychique et le somatique.

- 5. — Enfin Freud n’a pas encore résolu le paradoxe qui apparaît entre la satisfaction pulsionnelle et le maintient du principe d’homéostasie, soit de la moindre tension qui gouverne le fonctionnement de l’appareil psychique.

Freud va conclure son étude de la sexualité en disant que si la théorie des pulsions est la partie
la plus importante de sa doctrine, elle reste aussi la moins achevée, la plus problématique. Il la
reprendra plus tard.

C’est dans La Métapsychologie publiée en 1915 que la pulsion sera élaborée dans sa
définition la plus rigoureuse.

La pulsion : sa source, sa poussée, son objet et son but.

« Si la pulsion est définie comme la résultante pour ce qui dans le psychique représente
l’exigence du travail qui lui est imposée en conséquence de sa liaison au corporel »
Freud va
faire de la pulsion un montage de 4 éléments :

Sa source, sa poussée, son objet et son but.

La source oblige à distinguer :

— Son point d’origine. Freud la situe dans les zones érogènes dont l’élection est peu explicitée, d’autant plus que tout le corps peut s’enflammer comme une zone érogène.

En même temps si les pulsions peuvent être innombrables, on peut quand même en dresser une liste élémentaire.

— La source d’énergie qui alimente la pulsion, elle réside dans des processus somatiques fort complexes qui constituent des réservoirs d’énergie fournies par des excitations internes. Cette notion de telles réserves d’énergie accumulée dans le somatique frise l’hérésie biologique.

— Quant à l’excitabilité spécifiquement sexuelle des zones érogènes elle serait liée à des modifications physico- chimiques difficile à explorer à cette époque.

Freud finit par reconnaître que tout cela l’oblige à introduire plus de présupposés que d’explications.

En neurophysiologiste averti qu’il était il tranche en disant que de toute façon il n’est pas nécessaire de connaître tous les mécanismes biologiques de l’excitabilité des organes pour raisonner psychologiquement, d’autant plus que l’insertion des pulsions dans le corporel est prouvée par le fait que la satisfaction de la pulsion est éprouvée au niveau de l’organe dont elle s’origine.

Il ne s’agit pas de pinailler Freud sur ses démonstrations dont il a parfaitement admis le caractère spéculatif, mais de suivre sa façon d’élaborer ce qu’il découvre à la lumière de sa pratique qui reste sa seule référence.

Même s’il a une pente biologisante indéniable dans ses avancées, il maintient l’écart entre deux domaines noués mais radicalement hétérogènes : Le psychique et le somatique, ce qui est déjà lisible dans son Esquisse de 1885.

Freud codécouvreur de la synapse

Donc pas de confusion avec lui. On s’apercevra en 1945 quand son Esquisse sera publié que l’appareil neuronique où il loge sa découverte, est l’ébauche de la synapse dont il a bien compris le fonctionnement, mais lui ce qu’il vise ce sont les lois de l’appareil psychique. La preuve en est, entre autres, que les réactions spécifiques par lesquelles il répond aux sollicitations ne permettent nullement de les assimiler au stimulus-réponse de l’arc réflexe.

Cela vaudra à Freud d’être considéré par les neurologues comme un des découvreurs de la synapse.
La poussée de la pulsion : elle est constante et ne peut donc être confondue avec un cycle biologique qui est toujours cyclique, avec un rythme qui comporte une phase ascendante
puis décroissante. La poussée de la pulsion n’est donc pas une force instantanée, elle est
continue et invariable, s’exerçant dans le sens de la chute de tension qui produit la
satisfaction pulsionnelle pour le plaisir du sujet.

I. — L’objet de la pulsion

Pour Freud il n’y a aucune harmonie préétablie entre la pulsion et la tendance sexuelle. Ce qui rend très problématique l’idée de certains post- freudiens qui Parlent d’une maturation de la sexualité qui « normalement » devrait permettre au sujet d’aboutir à un amour réfléchi lui faisant choisir l’objet qui le compléterait pour lui assurer un bonheur tranquille et paisible. Il y a lieu ici de rappeler la distinction à faire entre l’objet désiré interchangeable et l’objet aimé dont le choix se spécifie dans le cadre du narcissisme. Finalement le statut de l’objet est difficile à saisir chez Freud qui ne parlera jamais de la relation d’objet.

II. — Le but de la pulsion

Il est avant tout d’obtenir la satisfaction, on verra plus loin comment Freud en parle car il est en difficulté pour en donner le sens et résoudre les paradoxes qu’il présente à son observation.
Freud va ensuite étudier le destin ou plutôt les vicissitudes des pulsions :

III. — Le renversement dans le contraire

En ce qui concerne le renversement dans le contraire, il faut distinguer :

Le retournement entre passif et actif.

Le renversement du contenu de la pulsion.

a. — Le retournement entre passif et actif, va nous conduire à bien faire la distinction entre
la mise en jeu de la pulsion proprement dite et l’exercice d’une perversion :

En effet s’agissant de la dite pulsion sadomasochiste, Freud éclaire la réversion de la pulsion de l’activité de tourmenter à la passivité d’être tourmenté. Il précise en fait qu’on passe de la voie active du verbe tourmenter non pas à la voie passive être tourmenté, mais par la voie moyenne se faire tourmenter.

Freud ne perd pas la corde de son raisonnement quand il dit que l’activité de tourmenter, se retourne en se tourmenter dans un sens d’autopunition, chez l’obsessionnel, plus tard dans Le problème économique du masochisme il parlera à ce propos de masochisme moral.

Occasion ici de faire remarquer que les névrosés peuvent présenter des traits de perversion mais qui ne sont pas mis enjeu comme dans une perversion vraie.

À l’époque Freud ne pouvait pas encore en faire la distinction, d’autant plus qu’il faut ajouter ici encore que la pulsion sadomasochiste n’existe pas.

Pour ce qu’il en est de la pulsion scopique où l’on pourrait croire à la réversibilité voyeurisme- exhibitionnisme, Freud est encore plus précis.

La joie de voir (Shaulust), comme satisfaction pour le sujet n’est pas sans le plaisir d’être pris par la fascination ou la contemplation du regard ne nécessitant pas forcément la mise enjeu de l’autre.
La distinction entre pulsion et perversion est plus facile à faire ici.

Notons que dès cette époque Freud faisait la distinction entre le regard et la vision, qui relève déjà d’une longue tradition philosophique.

Tout l’intérêt de cette étude est de nous montrer en quoi la réversion de la pulsion, se fait selon un trajet d’aller retour indissociable et que ce mouvement ne peut être saisi que par la grammaire parce que la pulsion n’est pas phénoménologiquement objectivable.

Freud en donnera une démonstration sans équivoque dans l’analyse qu’il fait du fantasme On bat un enfant.

b. — Quant au renversement du contenu de la pulsion qu’il exemplifie par l’ambivalence amour haine , Freud va se contredire. Dans les prémisses de son texte il dit que l’ambivalence peut passer pour une caractéristique de la réversion de la pulsion, mais toute la suite de son travail montre qu’il ne range pas ces affects comme appartenant au champ des pulsions.
Peu à peu le statut de signe dans la pulsion sera dégagé. Le mouvement de la pulsion et le sens de son contenu n’étant saisissables que dans le jeu de la grammaire.

IV. — Le retournement sur la personne propre

V. — Le refoulement

S’agissant du refoulement comme un des destins de la pulsion, sans ambiguïté Freud affirme que ce qui est refoulé c’est son représentant (Vorstellung-repräsentanz) dans le psychique.

C’est-à-dire le représentant de la représentation pour aller constituer le refoulement originaire.

Ce premier noyau désormais inaccessible va attirer à lui les rejetons psychiques du représentant refoulé en des chaînes de pensées associées à lui.

C’est ce que Freud appelle le refoulement proprement dit.

Mais refoulement ne veut pas dire disparition pour autant.

C’est une disparition qui n’est pas sans retour de refoulé sous la forme de rejetons qui désignent et conservent à la fois ce qui a été refoulé, car ils sont topiquement liés.

Ainsi en est-il des formations de l’inconscient et notamment du symptôme.

Le symptôme est un destin de la pulsion, il comporte donc une satisfaction, mais qui est pour le moins paradoxale puisqu’il est un lieu de souffrance en même temps.

Sans pouvoir encore en résoudre l’énigme Freud fait quand même de cette souffrance une équivalence avec la jouissance sexuelle.

Le problème de la satisfaction de la pulsion fait réellement difficulté pour Freud et va l’amener à des remaniements conceptuels très important, pour en trouver la solution - il sait d’expérience que le sujet ne renonce pas si facilement à ses symptômes.

Pourquoi chez l’homme ayant un appareil psychique dont une des fonctions principales est de lui éviter le déplaisir - d’ailleurs c’est la cause du refoulement, pourquoi et comment se répètent chez lui des expériences de douleur ?

Il les relève à partir de la clinique, dans la répétition des symptômes, des expériences traumatiques, certains jeux de l’enfant et enfin dans les cauchemars.

« II y aurait donc au -delà du principe de plaisir une modulation insistante source de douleur,
paradoxale au regard de sa théorie. »

Il y aurait là la répétition d’un déplaisir Qui serait éprouvé comme un plaisir.

La première solution qu’il propose est la suivante :

Alors que la tension doit s’accompagner de déplaisir, il y a des cas où elle s’accompagne de
plaisir, tout spécialement en ce qui concerne la jouissance sexuelle, car elle est toujours la
référence centrale pour Freud dès qu’il parle de plaisir.

En effet l’érection du désir sexuel, sa tension est éprouvée comme une satisfaction recherchée dans le plaisir préliminaire. Cela est possible parce que pendant cette phase de tension le seuil du principe de plaisir s’élève ensorte que la tension est plaisir, mais cette phase ne doit pas durer trop longtemps sinon la douleur apparaît.

C’est l’orgasme qui met fin à cette tension.

Il y a chez Freud une intuition géniale puisqu’il est en train de faire la distinction entre le
plaisir et la jouissance sexuelle dont l’atteinte n’est pas si simple car elle comporte un versant
douloureux, surtout pour la femme.

Freud fait donc de la jouissance sexuelle la mesure de toutes les satisfactions pulsionnelles.

Il pourra alors avancer que ce qui se répète au-delà du principe de plaisir, dans cette
modulation qui insiste, réside une jouissance, une jouissance qui est douleur mais qui en tant
qu’elle est quand même une jouissance peut être recherchée par le sujet, d’où l’étude qu’il
produira en 1924, Le problème économique du masochisme.

Cette modulation est un principe d’inertie qui ramène toujours à la même expérience d’une
jouissance ruineuse possiblement au regard de la vie.

Après avoir si bien nommée cette compulsion à souffrir contrainte de répétition, Freud va
l’appeler hélas instinct ou pulsion de mort en l’opposant à la pulsion de vie.

Eros et Thanatos tel est le nouveau dualisme pulsionnel qui vient se substituer, pour la
confusion de tous, à l’ancien dualisme entre les pulsions d’auto-conservations et les pulsions
sexuelles
qui désignaient l’organisation de la sexualité.

VI. — La sublimation.

Du mythe de la pulsion à la dérive de la jouissance, 2e partie.

Freud ne considère pas avoir défini de façon assurée, le statut problématique de la pulsion.

C’est une illusion rétrospective pour autant que c’est Lacan qui va en faire un concept fondamental de la psychanalyse, et par un cheminement qui n’est pas toujours facile à suivre.

Quand Freud écrit dans, sa Métapsychologie (1915), que la pulsion peut de définir comme la résultante pour ce qui dans le psychique représente l’exigence de travail imposé à l’appareil psychique en conséquence de sa liaison au corporel, on saisit bien qu’il essaye d’intégrer sa découverte au biologique.

Freud est un darwinien convaincu.

Sa théorie tient compte de l’évolutionnisme, intégrant la phylogénèse et l’ontogénèse.

Freud ne dispose pas du terme de structure, ni de la notion d’autonomie du symbolique.

Il ne songe pas un seul instant à l’autonomie du langage, et ne dispose pas non plus du terme de structure. Ni ne dispose des catégories lacaniennes du Réel, de l’Imaginaire et du Symbolique.

Il élabore cependant sa découverte de l’inconscient et son fonctionnement en des termes qui anticipe la théorie du signifiant, mais à son insu.

Sans pour autant faire de la psychanalyse une science juive, il reste toujours fidèle à la tradition judaïque de la lettre, et se guide sur les déplacements de la lettre pour lire les textes que sont les formations de l’inconscient, rêves, mots d’esprit, symptômes et toutes les manifestations qu’il collige dans sa Psychopathologie de la vie quotidienne.

Le mot est lâché, hélas qui prêtera à toutes les confusions.

En effet la clinique psychanalytique n’est pas une clinique du déficit,

car elle a à faire avec les manifestations du sujet dans la plus grande variété de ses modes d’expression. Psychopathologie et psychanalyse sont antinomiques.

Freud distingue le sexuel, biologique de la sexualité comme représentée dans le psychisme.

Freud va devoir distinguer ce que serait le sexuel proprement biologique, organique, de la sexualité en tant qu’elle est représentation psychique.

J’avais souligné comment il maintenait qu’il y a des normes sociales, raison pour laquelle la sexualité « normale » est au service de la reproduction de l’espèce, alors qu’il découvrait pour sa surprise que la sexualité humaine est intrinsèquement perverse.

A l’époque du fait du scientisme ambiant, des préjugés sociaux et de la religion, toute déviance était considérée comme une tare congénitale ou acquise, une dégénérescence liée en particulier à la syphilis.

De plus Freud n’avait pas encore isolé la perversion comme une structure subjective spécifique.

La pulsion n’est pas observable phénoménologiquement.

Cela n’empêche pas que l’on peut lire dans son texte que toute sa démarche vise à dé-substantiver la pulsion, car elle n’est pas observable phénoménologiquement.

Encore que chez lui la référence à une supposée pulsion phallique laisse place à l’imagination de ce que serait le fonctionnement pulsionnel, entre tumescence et détumescence de l’organe mâle pris comme modèle.

Pulsion de vie, pulsion de mort.

Il est tout à fait remarquable qu’après sa 2e topique, où il introduit les notions énigmatiques des pulsions de vie et pulsions de mort qui sont intriquées, il puisse avancer que la notion de pulsion est indispensable pour comprendre les manifestations de l’inconscient mais en même temps que « les pulsions sont des êtres mythiques, grandioses dans leur indétermination ».

Une appréhension dogmatique de Freud ou de Lacan, devient un handicap dans l’analyse, comme résistance de l’analyste, empêchant l’analysant de produire ses propres inventions.

La démarche de Freud est différente, il est prêt à remanier des points de sa théorie dès que les faits cliniques les contredisent :

- Il reconnaît que c’est Anna O qui à nommé la cure « la Talking cure »

- Il considère que les théories sexuelles d’un enfant ne sont pas simplistes, mais aussi élaborées que celles des adultes dans leurs inventions.

La façon dont Freud traite le petit Hans le démontre.

Freud psychanalyste du Petit Hans.

Je tiens que Freud est l’analyste de cet enfant, qui lui ne s’y trompe pas, c’est pourquoi à son père qui lui dit ne pas comprendre ce qu’il lui dit, Hans lui réplique :

« Cela ne fait rien, écris le pour le Professeur, lui il comprendra ».

Pas toujours d’ailleurs, mais Freud fais confiance à l’enfant, comme tout analysant c’est lui le sujet-supposé-dire vrai, même si ce n’est pas le réel.

Ainsi quand ce dernier dit que le plombier vient lui dévisser le « zizi », Freud se précipite pour lui dire que c’est pour lui en mettre un plus grand — lui coupant ainsi le sifflet.

Du coup on ne saura jamais ce que l’enfant voulait dire, alors que toute l’observation fait apparaître que Hans s’interroge sur le caractère amovible, détachable du phallus qu’il ne confond pas avec son organe.

Tel est le sens de la remarque qu’il fait à sa mère :

« Si tu en avais un il serait aussi gros que celui d’un cheval. »

On saisit bien que c’est la possession de son organe profondément enraciné et de sa jouissance « chari-varante » qui lui font embarras à comprendre la signification du phallus.

Faut-il se précipiter et dire que Freud se trompe ?

Je ne le crois pas. Il se fie à l’ordre du discours qui impose de reconnaître, que l’organe mâle est dit phallique.
Celles qui ne l’ont pas, au déclin de l’oedipe auront à faire avec la nostalgie du manque phallique si mal nommé « pénis-neid ».

L’homme n’est pas mieux loti il aura à faire avec le roc de la castration.

À cet égard il y a aussi des hommes qui souffrent de «  pénis-neid » parce qu’ils trouvent qu’ils ont un organe trop petit.

Pourquoi l’organe mâle est-il dit phallique par le discours ?

On ne le sait pas vraiment bien, mais probablement pour la raison, inconnue elle aussi, qu’il est le siège accidentel d’une jouissance singulière, privilégiée objectivable et comptable.

De plus la tumescence et la détumescence du dit organe est la meilleure représentation de ce que serait l’énigme du phallus qui ne se perçoit jamais aussi bien qu’au moment de disparaître.

L’identité sexuée est indépendante de l"anatomie.

Freud ne s’y trompera pas puisqu’il considère que l’identité sexuée de l’individu est relativement indépendante de l’anatomie. Ce dont témoigne à sa façon le petit Hans.

Freud n’a pas élaboré le concept de phallus.

Il lui aura fallu presque trente ans pour donner son vrai sens aux notions de mère phallique (ou de femme phallique).

C’est l’enfant qui attribue à sa mère, dans son fantasme un phallus.

Le plus souvent d’ailleurs à son insu à elle. Ce qui n’empêchent pas que certaines femmes peuvent se prêter à ce jeu de leurre, ou d’être qualifiée de femmes phalliques en tant qu’elles tiennent le pouvoir par leur discours.

Il en est ainsi pour certains hommes, surtout ceux qui se croient tout puissant, tout savant.

Enfin dernière remarque concernant Freud et la théorie. Il reste très ouvert à ce qui peut lui venir d’autres auteurs, mais en restant ferme sur ses positions – Il se sépare de Jung pour maintenir que la libido est sexuelle, alors que ce dernier en fait un intérêt général pour le monde, dissolvant ainsi, la valeur de cette notion capitale.

Mais en revanche, dans les textes Président Schreber, Freud reconnaît que sa théorie des rayons divins est assez proche de ce qu’il avance sur le narcissisme.

Les traductions en français de Freud fourmillent de contresens.

Quant à la lecture de Freud en français, elle est rendue encore plus difficile par les nombreux contresens qui fourmillent dans les traductions même les plus récentes.

Par exemple vous lirez certains passages où il est traduit que c’est le primat du génital qui oriente le développement de la sexualité infantile, et dans d’autres traductions que c’est le primat du phallus autour de quoi s’organise et s’oriente la sexualité de l’enfant.

S’il ne s’agissait pas du phallus la notion de complexe de castration n’aurait aucun sens.

Une fois de plus la confusion se fait entre ce qui relève de la maturation biologique du corps et la logique du fantasme dans le défilé oedipien.

Il ne faut pas oublier qu’au début, pour Freud l’oedipe suivait la pente de la nature, ce n’est que plus tard qu’il en fait une construction mythique, obligeant le sujet à faire des choix contingents dans le déroulement de sa diachronie.

La pulsion pour Freud se saisit par son articulation grammaticale.

On peut quand même lire que Freud ne peut saisir le trajet de la pulsion qu’à se repérer à son articulation grammaticale.

Mais d’autres confusions surgissent quand il parle de la fameuse pulsion sado-masochiste (laquelle n’existe pas) ou encore de la pulsion scopique.

Distinguer la mise en jeu de la pulsion de la perversion vraie.

Dans ces deux exemples, on a du mal à faire la distinction entre la mise en jeu de telle ou telle pulsion chez n’importe quel sujet et l’exercice des perversions sadiques ou masochistes (lesquelles existent) ou encore le voyeurisme ou l’exhibitionnisme.

Il faut cependant remarquer que s’agissant de la pulsion scopique il fait distingue très précocement la distinction entre la vision et le regard.

Disposition perverse de la sexualité infantile, plutôt que perversion polymorphe.

Quand Freud parle le sexualité infantile, il dit le plus souvent qu’elle est à disposition perverse, lui ouvrant ainsi un très large horizon dans son développement.

Or les traductions françaises parlent de l’enfant comme d’un pervers polymorphe, alors que Freud fait très rarement usage de cette appellation parce qu’il ne confond pas l’organisation et les manifestations de sa sexualité avec celle de l’adulte pervers qui est tout autrement structurée.

La pulsion est une tendance ou une motion liée à une représentation dont le sujet se retrouve au retour de la boucle dans la satisfaction qu’il en éprouve.

Le grand secret est là : c’est dans la mise en acte de son fantasme que l’on peut repérer ce qu’il en est des pulsions partielles préférentielles pour un sujet.

La pulsion se repère dans le jeu de la grammaire.

On en repère les mouvements dans le jeu de la grammaire.

Toute pulsion est silencieuse.

N’oublions pas que pour Freud toute pulsion est silencieuse.

Il ne faut donc pas s’étonner qu’il n’ait pas inventé la pulsion invocante.

C’est ainsi que quand Lacan articulera plus tard ce qu’il en est de cette pulsion, et que son objet la voix est aphonique, ses élèves auront beaucoup de difficultés à le comprendre. On y reviendra.

Ce qui est refoulé c’est Vorstellung-repräsentanz.

S’agissant du refoulement comme l’une des vicissitudes de la pulsion, Freud écrit que ce qui est refoulé, c’est ce qui la représente dans le psychisme, soit :
Le représentant de la représentation, c’est la traduction lacanienne du terme de Freud Vorstellung-repräsentanz.

Mais il y a quelque chose de la pulsion qui subit un destin très différent : l’affect.

Pour Freud l’affect n’est pas refoulé.

Le quantum d’affect se détache de son représentant et va s’accrocher à leurs rejetons ou à d’autres représentants non refoulés qui se substituent au refoulé selon un mode de liaison par enchaînement.

Freud prend soin de préciser d’ailleurs que refoulement ne veut pas dire disparition, qu’il n’est pas sans retour de rejetons, par exemple les symptômes, entre autres, sont des formations de l’inconscient par retour du refoulé sous une forme masquée, ou déformée.

De ce fait, l’affect peut changer de sens, l’amour changer en haine, la pitié en cruauté, la tristesse en joie.

L’affect n’est pas l’être donné dans son immédiateté.

Chez Freud donc en définitive, l’affect n’est pas l’être donné dans son immédiateté, il procède du discours qu’il habite.

Ainsi quel est le statut de l’angoisse chez Freud ?

Au début l’angoisse est secondaire au refoulement comme expression du quantum d’énergie restée libre après le refoulement.

Mais dans son texte Inhibition, Symptôme, Angoisse, de 1920 (d’ailleurs illisible dans toutes ses traductions françaises) Freud change de position.

Il affirme que l’angoisse, sentiment de déplaisir, produit le refoulement et non pas le contraire.

Le motif et la finalité du refoulement ne servent à rien d’autre que l’évitement du déplaisir.

Une fois de plus comment le problème économique des pulsions reste au centre des questions de Freud, qui n’hésite pas à changer les perspectives.

En effet les paradoxes qui se présentent dans la satisfaction de la pulsion contreviennent parfois au fonctionnement du couplage principe de plaisir- principe de réalité, censé régler l’homéostasie du fonctionnement de l’appareil psychique qui doit rester dans les limites du plaisir.

Freud va plus loin, si la pulsion est sexuelle, alors sa satisfaction est à nouer à la jouissance obtenue dans l’orgasme.

Les satisfactions pulsionnelles sont à mesurer à l’échelle de l’orgasme.

Tous les autres ordres de satisfactions pulsionnelles sont à mesurer à cette échelle.

C’est une thèse forte, qui écarte d’emblée le fleuve de boue de l’occultisme et notamment le courant Jungien.

Freud préfère tenir cette position même si elle lui pose des problèmes qu’il n’arrive pas à résoudre.

Il y a d’innombrables passages dans ses textes ou Freud fait l’équivalence entre la souffrance du symptôme et la jouissance orgasmique.

Au début de son œuvre, Freud disait qu’il n’y pas de masochisme primaire, c’est-à-dire érogène.

Pour lui le masochisme était un retournement sur la personne propre de son sadisme constitutionnel.

Comment alors un plaisir peut-il être ressenti comme un déplaisir et un déplaisir transformé en plaisir ?

La satisfaction pulsionnelle qui tient à la baisse de tension peut-elle être du même ordre que la jouissance sexuelle, qui est souvent le lieu même de l’insatisfaction subjective dont est partie la psychanalyse ?

Satisfaction pulsionnelle et orgasme.

Il y a deux versants au plaisir :

- Tant que la tension est contenue dans les limites du principe de plaisir, elle est éprouvée comme plaisir.

- La jouissance sexuelle, déborde le cadre du principe de plaisir, c’est pourquoi certains sujets ne peuvent l’atteindre car elle est éprouvée ou redoutée comme souffrance pour des raisons symptomatiques propre à chacun.

- Le plaisir sexuel est précédé d’une phase dite de plaisir préliminaire, dont la fonction est d’élever le seuil de la tension qui pourrait être ressentie comme douloureuse, de sorte que cette phase préparatoire permet le dépassement du seuil d’excitation compatible avec le plaisir et donne accès à la jouissance, par son aboutissement à l’orgasme.

Il faut dire que Freud ne distingue pas toujours le plaisir (Lust) et la jouissance (Genuss). Ce terme de Genuss est rarement usité par lui. Il l’emploie essentiellement pour désigner une jouissance excessive qui confine à l’horreur.

Pour lui, seule peut-être la jouissance sexuelle, éprouvée comme débordement de plaisir est vraiment désirable, mais pas d’une atteinte facile.

Il va cependant faire de l’orgasme le maximum de bonheur que peut espérer atteindre un être humain dans son existence. Il lui vient d’ailleurs un exemple cocasse pour illustrer son propos :

Celle du nourrisson, s’endormant en extase dans les bras de sa mère après la têtée.

On peut lire que Freud fait une opposition polaire entre plaisir et jouissance qu’il qualifie de déplaisir voire d’un mal, mais il utilise assez rarement le terme de jouissance.

Il est en difficulté pour comprendre les paradoxes de leur interférence ou de leur recouvrement.

C’est dans son texte Au-delà du principe de plaisir (1920), qu’après s’être interrogé sur les rapports de la satisfaction avec le principe d’homéostasie, qu’il va articuler ce qu’il en est des relations entre la satisfaction, le déplaisir et les phénomènes de répétition.

Pourquoi, l’être humain dont l’appareil psychique est réglé par le principe de plaisir, est-il soumis à quelque chose qui à l’air d’un mécanisme de répétition mettent en échec le principe de constance, et le soumet à faire des expériences douloureuses répétitives, symptômes, cauchemars et certains jeux de l’enfant, entre autres ?

Telle est la question que Freud se pose.

La compulsion de répétition.

Il nomme ce mécanisme contrainte ou compulsion de répétition.

Si la pulsion fonctionne comme une insistance du sujet pour parvenir à la satisfaction, et qui appelle à son renouvellement car elle est limitée, la compulsion de répétition si bien nommée comme telle, une contrainte de répétition c’est autre chose, car cette nomination à l’avantage de poser la question de sa causalité.

Au-delà du principe de plaisir écrit Freud, il y a une contrainte de répétition.

Il va en expliquer l’existence par une spéculation très élégante.

Hélas est-ce de Freud ou à cause de ces traducteurs, que cette contrainte est nommée le plus souvent comme pulsion ou instinct de mort, laquelle est intriquée avec la pulsion ou l’instinct de vie ?

Ce qui va très singulièrement compliquer leur compréhension par les élèves de Freud, et en même temps pour l’opinion.

Freud avait déjà radicalement distingué les pulsions sexuelles des pulsions d’autoconservations, qui elles sont rapportables aux besoins vitaux de l’individu.

Envers et contre tout, notamment le monisme Jungien, Freud a toujours maintenu sa thèse du dualisme pulsionnel :

- D’une part : La pulsion de vie (Eros), composée des pulsions sexuelles, au service de la reproduction de l’espèce et les pulsions d’autoconservations qui sont au service de la conservation de l’individu.

- D’autre part : La pulsion de mort (Thanatos), soit la contrainte de répétition.

Le raisonnement est très logiquement mené, mais les cartes vont se brouiller, parce que Eros et Thanatos sont très intriquées entre elles et agissent de façon antagoniste.

Remarquez en effet que les pulsions sexuelles dont se transmet la vie, n’en véhiculent pas moins la mort de l’individu, lequel du fait d’être sexué est voué à la mort au regard de la perpétuation de l’espèce, dont il n’est qu’un maillon. Mais en même temps il lui faut bien rester vivant pour participer à la reproduction.

Freud va se lancer dans une reprise des théories de Weismann, pour lequel les cellules somatiques représentent la mort par rapport aux cellules germinales qui sont immortelles.

Ce qui complique encore la compréhension des choses, vient de ce que les pulsions ont pour fonction de restaurer un état antérieur de moindre tension.

Elles sont donc au service d’un principe d’inertie, donc de dégradation d’énergie par rapport au mouvement de la vie.

Dans cette mesure elles sont aussi au service de la pulsion de mort.
À ce propos Freud écrit ceci :

« La vie au fond n’aspire qu’à retourner au repos des pierres, mais elles ne peut le faire qu’en repassant par des traces ».

Ce sont ces fameuses traces mnésiques, qui insistent comme cette modulation qui est au-delà du principe de plaisir et que Freud nomme pulsion de mort.

Il est difficile de s’y retrouver, même si c’est logiquement enchaîné.

Freud le reconnaît, et il porte sur cette spéculation un jugement qui est en même temps un très joli jeu de mot :

« Ce à quoi on ne peut atteindre en volant, il faut y atteindre en boitant… Il est dit dans l’Écriture que boiter n’est pas un péché ».

On peut se demander pourquoi nomme t’il la poussée vitale pulsion de vie, alors qu’en darwinien averti, qu’il est, il sait que la logique du vivant ne procède que par selection-hasard.

Ce qu’est la vie et même le vivant pose des énigmes qui sont loin d’être résolues encore aujourd’hui.

On ne sait rien du réel du sexe.

On arrive d’ailleurs aujourd’hui à reproduire des animaux sexués, en se passant des spermatozoïdes et même des cellules germinales.
Pourquoi Freud nomme t-il de même pulsion de mort, cette contrainte de répétition qui ne relève pas de la logique du vivant et même plus, qui ne prend sans doute aucune part à la prolifération de la vie ?

Il faudra tout le travail de Lacan pour donner à ces instances leur vraie signification, car elles appartiennent à des ordres hétérogènes.

Les termes de pulsion de vie ou pulsion de mort, si l’on en reste à la définition freudienne de la pulsion, posent les questions de savoir quelles sont leurs sources, leurs trajets, leurs poussées, leurs objets, leurs buts ?

Après tout la vie , la mort sont innommables. Comment s’interagissent-elles ?

On l’ignore et il ne faut pas compter sur les dits psychosomaticiens pour en résoudre les énigmes.

Ils sont d’ailleurs trop ignorants en matière de biologie et pour la plus grande majorité, ils confondent les effets sur le sujet d’une maladie organique, avec la supposée induction subjective des maladies, illustrant le plus souvent leurs « thèses » par une clinique plutôt optimiste et comme toujours irréfutables.

Faire-savoir.

Quant à interpréter la raison des guerres par la mise en jeu de la pulsion de mort, c’est participer d’un réductionnisme psychologisant consternant.

Nous disposions au départ, de la première topique, où se distinguaient, la perception, l’inconscient, le préconscient et la conscience.

Les traces mnésiques étaient situées dans l’inconscient comme marques des premières expériences de l’enfant avec le monde, grâce à quoi c’est à partir de cette mémoire inconsciente qu’il lui était possible de faire ses choix d’objets qui étaient toujours des retrouvailles, en fait, par rapport à l’objet premier et perdu à jamais.

Les traces mnésiques.
On pouvait aussi s’interroger sur la nature de ces traces.

Or qu’advient-il avec la seconde topique (1923), qui ne se superpose nullement avec la première, ce qui va rendre la compréhension de la constitution de l’appareil psychique encore plus difficile.

Distinction entre l’inconscient et le ça.

Freud produit cette nouvelle topique, parce qu’il considère, avec raison, que ses élèves détournent le sens de sa découverte de l’inconscient au profit d’un retour au Moi.

Mais aussi parce que l’efficacité de la psychanalyse perd de son tranchant, sans oublier le rejet complet de son dualisme pulsion de vie – pulsion de mort.

Le schéma de la 2e topique.

Il va donc produire ce fameux schéma dit de « l’œuf » pour articuler, dans leurs rapports, les instances psychiques du ça (qui représente le vitellus), du moi (c’est le jaune de l’œuf qui s’est constitué à partir du ça) et du surmoi (représenté comme une pipette ouverte sur le dehors).
Qu’en est-il de l’inconscient ?

Disparu, trop dispersé, confondu avec le ça, ou représenté par quelques stries. Ce qui à eu des effets de confusion encore plus grand chez les post-freudiens.

Le moi n’est plus une instance imaginaire, narcissique, il est issu par différenciation du ça, ce qui le fait dépendre quelque peu de l’organique.

Il est de plus assimilé avec la conscience, dont Freud ne savait pas vraiment où le placer dans sa première topique. Faisant le grand écart entre la perception et le préconscient dont il était le prolongement.

Quant à la pathologie elle était causée par le conflit entre ces trois instances.

Freud s’y retrouvait peut-être, mais certainement pas ces élèves.

Je fais là un travail de déconstruction un peu acerbe, mais c’est pour nous donner quelques aérations et nous permettre de repenser la théorie comme le faisait Freud au jour le jour de notre pratique quotidienne.

Les livres garants du savoir analytique sont bien rangés dans nos bibliothèques, et il n’est pas interdit de les lire d’une façon un peu moins dogmatique voire universitaire.

Freud lui ne perd pas la corde de ses spéculations, il avance sur plusieurs fronts à la fois et ne se gène pas pour soutenir en même temps des thèses contradictoires, quitte à y revenir quand il pense pouvoir les résoudre.

Il faut lire la 32o de ses Nouvelles conférences sur la psychanalyse (1932), ainsi que l’Abrégé de psychanalyse (1933) pour suivre comment il lève les confusions :

L’inconscient écrit Freud est (que Lacan traduira signifiants).

Il est à distinguer du ça considéré comme la partie la plus archaïque de l’appareil psychique.

Le ça est le réservoir des pulsions qui émanent de l’organisation somatique et s’y trouvent sous des formes inconnues, inorganisées, mais cependant comme un mode premier d’expression psychique.

Le ça cherche en outre à toujours obtenir la satisfaction des pulsions qui l’habitent et dont on peut faire une liste élémentaire.

On saisit bien combien la notion de pulsion est difficile à cerner chez Freud.

le reconnaît et maintient la nécessité d’en affirmer l’existence.

Il finit par présenter sa théorie des pulsions comme une véritable fiction :

« Pierre angulaire d’un édifice dans une voûte ».

Du mythe de la pulsion à la dérive de la jouissance, 2e partie.

Freud ne considère pas avoir défini de façon assurée, le statut problématique de la pulsion.
C’est une illusion rétrospective pour autant que c’est Lacan qui va en faire un concept fondamental de la psychanalyse, et par un cheminement qui n’est pas toujours facile à suivre.

Quand Freud écrit dans, sa Métapsychologie (1915), que la pulsion peut de définir comme la résultante pour ce qui dans le psychique représente l’exigence de travail imposé à l’appareil psychique en conséquence de sa liaison au corporel, on saisit bien qu’il essaye d’intégrer sa découverte au biologique.

Freud est un darwinien convaincu. Sa théorie tient compte de l’évolutionnisme, intégrant la phylogénèse et l’ontogénèse.

Il ne songe pas un seul instant à l’autonomie du langage, et ne dispose pas non plus du terme de structure. Ni ne dispose des catégories lacaniennes du Réel, de l’Imaginaire et du Symbolique.

Il élabore cependant sa découverte de l’inconscient et son fonctionnement en des termes qui anticipe la théorie du signifiant, mais à son insu.

Sans pour autant faire de la psychanalyse une science juive, il reste toujours fidèle à la tradition judaïque de la lettre, et se guide sur les déplacements de la lettre pour lire les textes que sont les formations de l’inconscient, rêves, mots d’esprit, symptômes et toutes les manifestations qu’il collige dans sa Psychopathologie de la vie quotidienne.

Le mot est lâché, hélas qui prêtera à toutes les confusions.

En effet la clinique psychanalytique n’est pas une clinique du déficit, car elle a à faire avec les manifestations du sujet dans la plus grande variété de ses modes d’expression. Psychopathologie et psychanalyse sont antinomiques.

Freud va devoir distinguer ce que serait le sexuel proprement biologique, organique, de la sexualité en tant qu’elle est représentation psychique.

J’avais souligné comment il maintenait qu’il y a des normes sociales, raison pour laquelle la sexualité « normale » est au service de la reproduction de l’espèce, alors qu’il découvrait pour sa surprise que la sexualité humaine est intrinsèquement perverse.

À l’époque du fait du scientisme ambiant, des préjugés sociaux et de la religion, toute déviance était considérée comme une tare congénitale ou acquise, une dégénérescence liée en particulier à la syphilis.

De plus Freud n’avait pas encore isolé la perversion comme une structure subjective spécifique.

Cela n’empêche pas que l’on peut lire dans son texte que toute sa démarche vise à
dé-substantiver la pulsion, car elle n’est pas observable phénoménologiquement.
Encore que chez lui la référence à une supposée pulsion phallique laisse place à l’imagination de ce que serait le fonctionnement pulsionnel, entre tumescence et détumescence de l’organe mâle pris comme modèle.

Il est tout à fait remarquable qu’après sa 2e topique, où il introduit les notions énigmatiques des pulsions de vie et pulsions de mort qui sont intriquées, il puisse avancer que la notion de pulsion est indispensable pour comprendre les manifestations de l’inconscient mais en même temps que « les pulsions sont des êtres mythiques, grandioses dans leur indétermination ».

Une appréhension dogmatique de Freud ou de Lacan, devient un handicap dans l’analyse, comme résistance de l’analyste, empêchant l’analysant de produire ses propres inventions.

La démarche de Freud est différente, il est prêt à remanier des points de sa théorie dès que les faits cliniques les contredisent :

- Il reconnaît que c’est Anna O qui à nommé la cure « la Talking cure ».

- Il considère que les théories sexuelles d’un enfant ne sont pas simplistes, mais aussi élaborées que celles des adultes dans leurs inventions.

La façon dont Freud traite le petit Hans le démontre.

Je tiens que Freud est l’analyste de cet enfant, qui lui ne s’y trompe pas, c’est pourquoi à son père qui lui dit ne pas comprendre ce qu’il lui dit, Hans lui réplique :

« Cela ne fait rien, écris le pour le Professeur, lui il comprendra ».

Pas toujours d’ailleurs, mais Freud fais confiance à l’enfant, comme tout analysant c’est lui le sujet-supposé-dire vrai, même si ce n’est pas le réel.

Ainsi quand ce dernier dit que le plombier vient lui dévisser le « zizi », Freud se précipite pour lui dire que c’est pour lui en mettre un plus grand –lui coupant ainsi le sifflet.

Du coup on ne saura jamais ce que l’enfant voulait dire, alors que toute l’observation fait apparaître que Hans s’interroge sur le caractère amovible, détachable du phallus qu’il ne confond pas avec son organe.

Tel est le sens de la remarque qu’il fait à sa mère :

« Si tu en avais un il serait aussi gros que celui d’un cheval ».

On saisit bien que c’est la possession de son organe profondément enraciné et de sa jouissance « chari-varante » qui lui font embarras à comprendre la signification du phallus.

Faut-il se précipiter et dire que Freud se trompe ?

Je ne le crois pas. Il se fie à l’ordre du discours qui impose de reconnaître, que l’organe mâle est dit phallique.
Celles qui ne l’ont pas, au déclin de l’oedipe auront à faire avec la nostalgie du manque phallique si mal nommé « pénis-neid ».

L’homme n’est pas mieux loti il aura à faire avec le roc de la castration.

À cet égard il y a aussi des hommes qui souffrent de « pénis-neid » parce qu’ils trouvent qu’ils ont un organe trop petit.

Pourquoi l’organe mâle est-il dit phallique par le discours ?

On ne le sait pas vraiment bien, mais probablement pour la raison, inconnue elle aussi, qu’il est le siège accidentel d’une jouissance singulière, privilégiée objectivable et comptable.

De plus la tumescence et la détumescence du dit organe est la meilleure représentation de ce que serait l’énigme du phallus qui ne se perçoit jamais aussi bien qu’au moment de disparaître.

Freud ne s’y trompera pas puisqu’il considère que l’identité sexuée de l’individu est relativement indépendante de l’anatomie. Ce dont témoigne à sa façon le petit Hans.

Freud n’a pas élaboré le concept de phallus.

Il lui aura fallu presque trente ans pour donner son vrai sens aux notions de mère phallique (ou de femme phallique).

C’est l’enfant qui attribue à sa mère, dans son fantasme un phallus.

Le plus souvent d’ailleurs à son insu à elle. Ce qui n’empêchent pas que certaines femmes peuvent se prêter à ce jeu de leurre, ou d’être qualifiée de femmes phalliques en tant qu’elles tiennent le pouvoir par leur discours.

Il en est ainsi pour certains hommes, surtout ceux qui se croient tout puissant, tout savant.

Enfin dernière remarque concernant Freud et la théorie. Il reste très ouvert à ce qui peut lui venir d’autres auteurs, mais en restant ferme sur ses positions – Il se sépare de Jung pour maintenir que la libido est sexuelle, alors que ce dernier en fait un intérêt général pour le monde, dissolvant ainsi, la valeur de cette notion capitale.

Mais en revanche, dans les textes Président Schreber, Freud reconnaît que sa théorie des rayons divins est assez proche de ce qu’il avance sur le narcissisme.

Quant à la lecture de Freud en français, elle est rendue encore plus difficile par les nombreux contresens qui fourmillent dans les traductions même les plus récentes.

Par exemple vous lirez certains passages où il est traduit que c’est le primat du génital qui oriente le développement de la sexualité infantile, et dans d’autres traductions que c’est le primat du phallus autour de quoi s’organise et s’oriente la sexualité de l’enfant.

S’il ne s’agissait pas du phallus la notion de complexe de castration n’aurait aucun sens.
Une fois de plus la confusion se fait entre ce qui relève de la maturation biologique du corps et la logique du fantasme dans le défilé oedipien.

Il ne faut pas oublier qu’au début, pour Freud l’oedipe suivait la pente de la nature, ce n’est que plus tard qu’il en fait une construction mythique, obligeant le sujet à faire des choix contingents dans le déroulement de sa diachronie.

On peut quand même lire que Freud ne peut saisir le trajet de la pulsion qu’à se repérer à son articulation grammaticale.

Mais d’autres confusions surgissent quand il parle de la fameuse pulsion sado-masochiste (laquelle n’existe pas) ou encore de la pulsion scopique.

Dans ces deux exemples, on a du mal à faire la distinction entre la mise en jeu de telle ou telle pulsion chez n’importe quel sujet et l’exercice des perversions sadiques ou masochistes (lesquelles existent) ou encore le voyeurisme ou l’exhibitionnisme.

Il faut cependant remarquer que s’agissant de la pulsion scopique il fait distingue très précocement la distinction entre la vision et le regard.

Quand Freud parle le sexualité infantile, il dit le plus souvent qu’elle est à disposition perverse, lui ouvrant ainsi un très large horizon dans son développement.

Or les traductions françaises parlent de l’enfant comme d’un pervers polymorphe, alors que Freud fait très rarement usage de cette appellation parce qu’il ne confond pas l’organisation et les manifestations de sa sexualité avec celle de l’adulte pervers qui est tout autrement structurée.

La pulsion est une tendance ou une motion liée à une représentation dont le sujet se retrouve au retour de la boucle dans la satisfaction qu’il en éprouve.

Le grand secret est là : c’est dans la mise en acte de son fantasme que l’on peut repérer ce qu’il en est des pulsions partielles préférentielles pour un sujet.

On en repère les mouvements dans le jeu de la grammaire.

N’oublions pas que pour Freud toute pulsion est silencieuse.

Il ne faut donc pas s’étonner qu’il n’ait pas inventé la pulsion invocante.

C’est ainsi que quand Lacan articulera plus tard ce qu’il en est de cette pulsion, et que son objet la voix est aphonique, ses élèves auront beaucoup de difficultés à le comprendre. On y reviendra.

S’agissant du refoulement comme l’une des vicissitudes de la pulsion, Freud écrit que ce qui est refoulé, c’est ce qui la représente dans le psychisme, soit :
Le représentant de la représentation, c’est la traduction lacanienne du terme de Freud Vorstellung-repräsentanz.

Mais il y a quelque chose de la pulsion qui subit un destin très différent : l’affect.

Pour Freud l’affect n’est pas refoulé.

Le quantum d’affect se détache de son représentant et va s’accrocher à leurs rejetons ou à d’autres représentants non refoulés qui se substituent au refoulé selon un mode de liaison par enchaînement.

Freud prend soin de préciser d’ailleurs que refoulement ne veut pas dire disparition, qu’il n’est pas sans retour de rejetons, par exemple les symptômes, entre autres, sont des formations de l’inconscient par retour du refoulé sous une forme masquée, ou déformée.

De ce fait, l’affect peut changer de sens, l’amour changer en haine, la pitié en cruauté, la tristesse en joie.

Chez Freud donc en définitive, l’affect n’est pas l’être donné dans son immédiateté, il procède du discours qu’il habite.

Ainsi quel est le statut de l’angoisse chez Freud ?

Au début l’angoisse est secondaire au refoulement comme expression du quantum d’énergie restée libre après le refoulement.

Mais dans son texte Inhibition, Symptôme, Angoisse, de 1920 (d’ailleurs illisible dans toutes ses traductions françaises) Freud change de position.

Il affirme que l’angoisse, sentiment de déplaisir, produit le refoulement et non pas le contraire.

Le motif et la finalité du refoulement ne servent à rien d’autre que l’évitement du déplaisir.

Une fois de plus comment le problème économique des pulsions reste au centre des questions de Freud, qui n’hésite pas à changer les perspectives.

En effet les paradoxes qui se présentent dans la satisfaction de la pulsion contreviennent parfois au fonctionnement du couplage principe de plaisir- principe de réalité, censé régler l’homéostasie du fonctionnement de l’appareil psychique qui doit rester dans les limites du plaisir.

Freud va plus loin, si la pulsion est sexuelle, alors sa satisfaction est à nouer à la jouissance obtenue dans l’orgasme.

Tous les autres ordres de satisfactions pulsionnelles sont à mesurer à cette échelle.

C’est une thèse forte, qui écarte d’emblée le fleuve de boue de l’occultisme et notamment le courant jungien.

Freud préfère tenir cette position même si elle lui pose des problèmes qu’il n’arrive pas à résoudre.

Il y a d’innombrables passages dans ses textes ou Freud fait l’équivalence entre la souffrance du symptôme et la jouissance orgasmique.

Au début de son œuvre, Freud disait qu’il n’y pas de masochisme primaire, c’est-à-dire érogène.

Pour lui le masochisme était un retournement sur la personne propre de son sadisme constitutionnel.

Comment alors un plaisir peut-il être ressenti comme un déplaisir et un déplaisir transformé en plaisir ?

La satisfaction pulsionnelle qui tient à la baisse de tension peut-elle être du même ordre que la jouissance sexuelle, qui est souvent le lieu même de l’insatisfaction subjective dont est partie la psychanalyse ?

Il y a deux versants au plaisir :
- Tant que la tension est contenue dans les limites du principe de plaisir, elle est éprouvée comme plaisir.
- La jouissance sexuelle, déborde le cadre du principe de plaisir, c’est pourquoi certains sujets ne peuvent l’atteindre car elle est éprouvée ou redoutée comme souffrance pour des raisons symptomatiques propre à chacun.
- Le plaisir sexuel est précédé d’une phase dite de plaisir préliminaire, dont la fonction est d’élever le seuil de la tension qui pourrait être ressentie comme douloureuse, de sorte que cette phase préparatoire permet le dépassement du seuil d’excitation compatible avec le plaisir et donne accès à la jouissance, par son aboutissement à l’orgasme.

Il faut dire que Freud ne distingue pas toujours le plaisir (Lust) et la jouissance (Genuss). Ce terme de Genuss est rarement usité par lui. Il l’emploie essentiellement pour désigner une jouissance excessive qui confine à l’horreur.

Pour lui, seule peut-être la jouissance sexuelle, éprouvée comme débordement de plaisir est vraiment désirable, mais pas d’une atteinte facile.

Il va cependant faire de l’orgasme le maximum de bonheur que peut espérer atteindre un être humain dans son existence. Il lui vient d’ailleurs un exemple cocasse pour illustrer son propos :

Celle du nourrisson, s’endormant en extase dans les bras de sa mère après la tétée.

On peut lire que Freud fait une opposition polaire entre plaisir et jouissance qu’il qualifie de déplaisir voire d’un mal, mais il utilise assez rarement le terme de jouissance.

Il est en difficulté pour comprendre les paradoxes de leur interférence ou de leur recouvrement.
C’est dans son texte Au-delà du principe de plaisir (1920), qu’après s’être interrogé sur les rapports de la satisfaction avec le principe d’homéostasie, qu’il va articuler ce qu’il en est des relations entre la satisfaction, le déplaisir et les phénomènes de répétition.

Pourquoi, l’être humain dont l’appareil psychique est réglé par le principe de plaisir, est-il soumis à quelque chose qui à l’air d’un mécanisme de répétition mettent en échec le principe de constance, et le soumet à faire des expériences douloureuses répétitives, symptômes, cauchemars et certains jeux de l’enfant, entre autres ?

Telle est la question que Freud se pose.

Il nomme ce mécanisme contrainte ou compulsion de répétition.

Si la pulsion fonctionne comme une insistance du sujet pour parvenir à la satisfaction, et qui appelle à son renouvellement car elle est limitée, la compulsion de répétition si bien nommée comme telle, une contrainte de répétition c’est autre chose, car cette nomination à l’avantage de poser la question de sa causalité.

Au-delà du principe de plaisir écrit Freud, il y a une contrainte de répétition.

Il va en expliquer l’existence par une spéculation très élégante.

Hélas est-ce de Freud ou à cause de ces traducteurs, que cette contrainte est nommée le plus souvent comme pulsion ou instinct de mort, laquelle est intriquée avec la pulsion ou l’instinct de vie ?

Ce qui va très singulièrement compliquer leur compréhension par les élèves de Freud, et en même temps pour l’opinion.

Freud avait déjà radicalement distingué les pulsions sexuelles des pulsions d’autoconservations, qui elles sont rapportables aux besoins vitaux de l’individu.

Envers et contre tout, notamment le monisme Jungien, Freud a toujours maintenu sa thèse du dualisme pulsionnel :
- D’une part : La pulsion de vie (Eros), composée des pulsions sexuelles, au service de la reproduction de l’espèce et les pulsions d’autoconservations qui sont au service de la conservation de l’individu.
- D’autre part : La pulsion de mort (Thanatos), soit la contrainte de répétition.

Le raisonnement est très logiquement mené, mais les cartes vont se brouiller, parce que Eros et Thanatos sont très intriquées entre elles et agissent de façon antagoniste.

Remarquez en effet que les pulsions sexuelles dont se transmet la vie, n’en véhiculent pas moins la mort de l’individu, lequel du fait d’être sexué est voué à la mort au regard de la perpétuation de l’espèce, dont il n’est qu’un maillon. Mais en même temps il lui faut bien rester vivant pour participer à la reproduction.

Freud va se lancer dans une reprise des théories de Weismann, pour lequel les cellules somatiques représentent la mort par rapport aux cellules germinales qui sont immortelles.

Ce qui complique encore la compréhension des choses, vient de ce que les pulsions ont pour fonction de restaurer un état antérieur de moindre tension.

Elles sont donc au service d’un principe d’inertie, donc de dégradation d’énergie par rapport au mouvement de la vie.

Dans cette mesure elles sont aussi au service de la pulsion de mort.
À ce propos Freud écrit ceci :

« La vie au fond n’aspire qu’à retourner au repos des pierres, mais elles ne peut le faire qu’en repassant par des traces ».

Ce sont ces fameuses traces mnésique, qui insistent comme cette modulation qui est au-delà du principe de plaisir et que Freud nomme pulsion de mort.

On peut schématiser son raisonnement de la façon la plus simple possible :

Il est difficile de s’y retrouver, même si c’est logiquement enchaîné.

Freud le reconnaît, et il porte sur cette spéculation un jugement qui est en même temps un très joli jeu de mot :
« Ce à quoi on ne peut atteindre en volant, il faut y atteindre en boitant…Il est dit dans l’Écriture que boiter n’est pas un péché ».

On peut se demander pourquoi nomme-t-il la poussée vitale pulsion de vie, alors qu’en darwinien averti, qu’il est, il sait que la logique du vivant ne procède que par sélection-hasard.

Ce qu’est la vie et même le vivant pose des énigmes qui sont loin d’être résolues encore aujourd’hui.

On ne sait rien du réel du sexe.

On arrive d’ailleurs aujourd’hui à reproduire des animaux sexués, en se passant des spermatozoïdes et même des cellules germinales.
Pourquoi Freud nomme t-il de même pulsion de mort, cette contrainte de répétition qui ne relève pas de la logique du vivant et même plus, qui ne prend sans doute aucune part à la prolifération de la vie ?

Il faudra tout le travail de Lacan pour donner à ces instances leur vraie signification, car elles appartiennent à des ordres hétérogènes.

Les termes de pulsion de vie ou pulsion de mort, si l’on en reste à la définition freudienne de la pulsion, posent les questions de savoir quelles sont leurs sources, leurs trajets, leurs poussées, leurs objets, leurs buts ?

Après tout la vie, la mort sont innommables. Comment interagissent-elles ?

On l’ignore et il ne faut pas compter sur les dits psychosomaticiens pour en résoudre les énigmes.

Ils sont d’ailleurs trop ignorants en matière de biologie et pour la plus grande majorité, ils confondent les effets sur le sujet d’une maladie organique, avec la supposée induction subjective des maladies, illustrant le plus souvent leurs « thèses » par une clinique plutôt optimiste et comme toujours irréfutables.

Quant à interpréter la raison des guerres par la mise en jeu de la pulsion de mort, c’est participer d’un réductionnisme psychologisant consternant.

Nous disposions au départ, de la première topique, où se distinguaient, la perception, l’inconscient, le préconscient et la conscience.

Les traces mnésiques étaient situées dans l’inconscient comme marques des premières expériences de l’enfant avec le monde, grâce à quoi c’est à partir de cette mémoire inconsciente qu’il lui était possible de faire ses choix d’objets qui étaient toujours des retrouvailles, en fait, par rapport à l’objet premier et perdu à jamais.

On pouvait aussi s’interroger sur la nature de ces traces.

Or qu’advient-il avec la seconde topique (1923), qui ne se superpose nullement avec la première, ce qui va rendre la compréhension de la constitution de l’appareil psychique encore plus difficile.

Freud produit cette nouvelle topique, parce qu’il considère, avec raison, que ses élèves détournent le sens de sa découverte de l’inconscient au profit d’un retour au Moi.

Mais aussi parce que l’efficacité de la psychanalyse perd de son tranchant, sans oublier le rejet complet de son dualisme pulsion de vie – pulsion de mort.

Il va donc articuler, dans leurs rapports, les instances psychiques du ça (qui représente le vitellus), du moi (c’est le jaune de l’œuf qui s’est constitué à partir du ça) et du surmoi (représenté comme une pipette ouverte sur le dehors).

Qu’en est-il de l’inconscient ?

Disparu, trop dispersé, confondu avec le ça, ou représenté par quelques stries. Ce qui à eu des effets de confusion encore plus grand chez les post-freudiens.

Le moi n’est plus une instance imaginaire, narcissique, il est issu par différenciation du ça, ce qui le fait dépendre quelque peu de l’organique.

Il est de plus assimilé avec la conscience, dont Freud ne savait pas vraiment où le placer dans sa première topique. Faisant le grand écart entre la perception et le préconscient dont il était le prolongement.

Quant à la pathologie elle était causée par le conflit entre ces trois instances.

Freud s’y retrouvait peut-être, mais certainement pas ces élèves.

Je fais là un travail de déconstruction un peu acerbe, mais c’est pour nous donner quelques aérations et nous permettre de repenser la théorie comme le faisait Freud au jour le jour de notre pratique quotidienne.

Les livres garants du savoir analytique sont bien rangés dans nos bibliothèques, et il n’est pas interdit de les lire d’une façon un peu moins dogmatique voire universitaire.

Freud lui ne perd pas la corde de ses spéculations, il avance sur plusieurs fronts à la fois et ne se gène pas pour soutenir en même temps des thèses contradictoires, quitte à y revenir quand il pense pouvoir les résoudre.

Il faut lire la 32e de ses Nouvelles conférences sur la psychanalyse (1932), ainsi que l’Abrégé de psychanalyse (1933) pour suivre comment il lève les confusions :

L’inconscient écrit Freud est une Autre scène corrélative au procès du refoulement des Vorstellung-repräsentanz (que Lacan traduira signifiants).

Il est à distinguer du ça considéré comme la partie la plus archaïque de l’appareil psychique.

Le ça est le réservoir des pulsions qui émanent de l’organisation somatique et s’y trouvent sous des formes inconnues, inorganisées, mais cependant comme un mode premier d’expression psychique.

Le ça cherche en outre à toujours obtenir la satisfaction des pulsions qui l’habitent et dont on peut faire une liste élémentaire.

On saisit bien combien la notion de pulsion est difficile à cerner chez Freud.

le reconnaît et maintient la nécessité d’en affirmer l’existence.

Il finit par présenter sa théorie des pulsions comme une véritable fiction :

« Pierre angulaire d’un édifice dans une voûte ».

Du mythe de la pulsion à la dérive de la jouissance, 2e partie.

Patrick Valas. Le 11/01/2010.


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de l’environnement écologique
mardi 28 juillet 2015 à 12h07 - par  DWT

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