Daniel Pendanx, les pétitions et l’interprète.

samedi 26 janvier 2013
par  P. Valas

Daniel Pendanx : Le mariage gay, les pétitions et l’interprète.

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Le mariage gay, les pétitions et l’interprète.

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D Pendanx les pétitions et l’interprète
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D Pendanx les pétitions et l’interprète

S’il peut paraître utile, dans l’agitation et les confusions actuelles, de démarquer la psychanalyse

de « certaines des thèses opposées au projet de loi » comme il est dit dans la déclaration publique agrégeant des personnalités du groupe millerien (1) – déclaration-pétition donnée, après la première de la même eau, en pâture à l’esprit de masse -, faudrait-il encore que les psychanalystes ne viennent par là cautionner les « thèses » de la nouvelle dogmatique, celle du sujet libre de toute attache fiduciaire, le sujet dispensé de l’Œdipe.

Faire le malin à l’endroit des ecclésiastiques est chose aisée,

saisir que le danger principal – la plus folle croyance au rapport sexuel – est du côté du nouveau familialisme, homoparental, et s’engager dans une résistance critique à son endroit, est une autre paire de manches, qui demande à l’interprète de conquérir une toute autre liberté, un autre courage politique.

Dans les attendus de cette déclaration la « religion » est donnée comme un consommable, à disposition du sujet, qu’on prend ou qu’on ne prend pas. C’est là l’esprit même du « marché des religions » – concept made in USA dont notre laïcité se repaît.

Un autre principe de la manœuvre théologico-politique peut être également repéré.

occultant la question du « d’où je cause », et la dimension proprement dogmatique d’une telle déclaration, les signataires s’adressent à nous comme si la parole ne supposait ses propres fondements langagiers, fictionnels, les fondements institués de la parole, et comme si ne se déployait en tout système de civilisation, sous la Référence – cette métaphore du lieu vide du Pouvoir, de l’Autre institutionnel – , un mythe fondateur (Genèse ou pas) dont la représentation centrale, sous des formes diverses, est celle du couple originaire Mère / Père.

Ce propos sera à coup sûr tenu pour un propos d’antiquité freudienne, voire lacanienne, tant le « dernier Lacan » semble pour certains annuler toute considération approfondie du fait que « le sort psychologique d’un enfant dépend du rapport que montrent entre elles les figures parentales » (in Les complexes familiaux), et toute prise en compte de l’étayage symbolique, culturel, institutionnel de ce rapport des figures entre elles. Un étayage noué à cet ordre langagier, des nominations de la parenté, dont le juridique est comptable, et ce faisant garant de l’identité.

Du « non rapport sexuel » ou de « la femme n’existe pas ».

Le droit, particulièrement le droit civil n’a en effet d’autre vocation anthropologique, clinique, je le répète dans le fil de l’apport de Pierre Legendre, que d’authentifier et faire valoir, selon la logique structurale ternaire, l’écart et la distinction entre les figures, soit l’espace vide, de séparation, que soulignent les formules de Lacan du « non rapport sexuel » ou de « la femme n’existe pas ».

Le droit et les juges ont cette fonction symbolique, clinique, et non, comme le juridisme ou l’anti-juridisme (son ombre portée) y conduisent [j’en ai la longue expérience dans le champ de la justice des mineurs], celle de gérer et de réguler les comportements, et ce le plus souvent dans les formes les plus actuelle, homoparentales, du familialisme – qui font du père une mère comme les autres.

Les juges ont pour fonction de remettre en scène, symboliquement en scène, la représentation œdipienne.

Les juges ont pour fonction de remettre en scène, symboliquement en scène, la représentation œdipienne, et de faire ainsi valoir l’écart, l’espace de séparation entre les figures : soit le fait que papa et maman c’est distinct, qu’on ne peut faire de papa une maman comme les autres, que papa + maman ça ne fait pas totalité, ça ne fait pas Un (un-stitution familiale), pas complémentarité, pas complétude, ça ne fait pas Mère totale … Mais il ne suffit pas de répéter à l’infini cela si par ailleurs, a contrario, on ferme les yeux ou l’on collabore à la déconstruction des digues et montages du droit qui soutiennent symboliquement le réel, le réel du non rapport sexuel. Je dirai même : le distingue, le font valoir comme tel. [Tout fondamentalisme, fondamentalisme du fantasme, sous-jacent à tout totalitarisme, se soutient d’un droit qui tend à récuser le Réel.]

L’incomplétude constitutive de notre condition de parlant a une facture institutionnelle, interne et externe au sujet, c’est un fait symbolique, juridique :

il n’y a de sujet de la parole (divisé du Sexe, divisé de la Mère) que sujet institué, autrement dit, c’est à mon tour de rabâcher, que sujet lié, quelles que soient ses boiteries subjectives, ses orientations sexuelles, à une représentation fondatrice non faussée – je dis bien, « représentation » – , où les figures Mère et Père, différenciées et croisées, ne sont pas confondues, mises à toutes les sauces de l’inceste et du meurtre, comme il en est dans « l’autre scène » du fantasme.

S’il n’est donc pas dans mon esprit que les interprètes viennent prêter main-forte à un juridisme visant à écraser ou interdire le fantasme, quelque fantasme de scène primitive que ce soit, soit-il celui des parents combinés, symétrisés, dont la fiction homoparentale est une expression directe, cristallisée, je ne crois pas pour autant que nous ayons à nous faire serfs de cette perversion de la fiction originaire dont la nouvelle loi sur le mariage est porteuse, avec à la clef la croyance redoublée en La Femme (la Mère absolue) et la légitimation du règne du fantasme…

Les producteurs de ces « pétitions » écrivent à l’unisson, comme si le juridique était dissociable du principe généalogique, du principe du Père (lui aussi rabattu par le féminisme ultra, à l’identique du machisme, sur la norme mâle, la « domination patriarcale », « le privilège matrimonial de l’hétérosexualité »), et n’avait rien à voir avec la logique des places !

Les praticiens qui s’embarquent dans ces pétitions, ou ont-ils si peur de passer pour des inactuels, des non progressistes ?

Les praticiens qui s’embarquent dans ces pétitions ne voient-ils donc le déséquilibre qui s’y implique, ou ont-ils si peur de passer pour des inactuels, des non progressistes ?

Charles Melman rappelait récemment : … ce qui était frappant, pour ceux qui ont connu la pratique de Lacan, c’est qu’il semblait obstiné justement, et parfois violemment, à la défense, à l’affirmation d’un certain ordre. Pas l’ordre patriarcal. Pas non plus l’ordre quelconque, ou l’ordre qui serait justement celui de «  Allez, faut foutre ça en l’air et puis on sera bien mieux ! » (JFP no37)

Mais pour Miller and Co : « La structure œdipienne n’est pas un invariant anthropologique » (2). Voilà, la formule dogmatique choc est crachée, assénée sans autre subtilité… Comment voudriez-vous que cela résonne autrement qu’au service du culte libéral-libertaire du Marché – le marché du libre service normatif ?

Ce genre de proposition dogmatique à l’emporte-pièce, sans rigueur, qui évacue ou réduit à peau de chagrin la question des fondements institués de la parole, ceux de la clinique, conduit à des pratiques désarticulées de la problématique œdipienne, dimension inconsciente et juridique comprise, et laisse au final le champ libre, sous l’idéal tant proclamé du «  sujet désirant », du «  sujet auto-fondé », au positivisme techno-gestionnaire, scientiste, et à un sociologisme généralisé – lesquels eux, du «  sujet  », en font leur affaire, l’affaire de la servitude volontaire, celle de la soumission consentante.

J’y insiste, « la femme n’existe pas » ou « il n’y a pas de rapport sexuel », c’est un fait de structure, langagier, un fait institutionnel, un effet des nominations (de la langue), noué juridiquement, par les montages du droit civil. C’est ce fait, ce nouage, ces montages, qui se trouvent aujourd’hui subvertis, déconstruits.

Voilà qui ne peut pousser qu’à l’inceste.

L’ecclésiastique, évoquant l’inceste – ce qui lui a valu tous les cris d’orfraie - n’a eu pour seul tort que de passer du registre de la représentation au réel un peu vite !

Ce rabattement des registres l’un sur l’autre (que Lacan n’a cessé me semble-t-il de chercher à déjouer, en dernier lieu avec ses nœuds) amène la plupart des opposants au « mariage pour tous » à se tenir dans le « débat » sur le même terrain (terrain sur lequel se déploie à tout va le psycho-sociologisme) que les tenants de la nouvelle loi, dans le même champ de croyance en la Femme : la croyance imaginaire à la complémentarité papa-maman.

Pour l’interprète – je livre ces deux propositions aux esprits et aux compagnons les plus libres –, la gageure «  politique » du moment me paraît être de :

-  prendre réellement en compte le statut social juridique tiers et limité de la psychanalyse, saisir que celle-ci ne peut-être livrée au Nombre, aux pétitionnaires, sans être ainsi « récupérée dans la féodalité des mythes religieux modernes » (3)

-  considérer la folie de la déconstruction juridique en cours, sans pour autant rebasculer dans l’œdipisme, le vieux juridisme.

Ce qui suppose de prendre acte, j’y reviens toujours, du pas de Legendre. Mais voilà qui conduirait peut-être à de nouvelles distinctions, à de nouveaux «  adieux »…

Bordeaux, le 26/01
Daniel Pendanx

(1) Cette déclaration est publiée sur le site Lacan-quotidien, et sur le forum du site Œdipe (fil, HOMOPARENTALITE, le débat).

(2) Qu’une telle proposition dogmatique ait été complaisamment publiée sur le forum du site si bien nommé Œdipe, initiant un prix "Oedipe", et soit jusqu’à présent restée sans suite, sans reprise critique, ne manque pas de sel… Je note qu’après avoir pu y engager mon propos (interventions auxquelles je renvoie ici le lecteur), suite à un conflitadvenu avec quelques uns (avec sa part de malentendu), mes derniers « posts » s’y trouvent refusés, dois-je dire censurés ?, comme s’il fallait, dès lors que vous ne rentrez pas dans les usages – quels usages ? - passer son chemin. Pour éviter le conflit ? Cela pourrait en effet aiguiser les enjeux : des enjeux proprement analytiques. Tenir les sujets hors conflit – annuler le rebelle et prier l’interprète de passer son chemin – reste, notez-bien, l’idéal d’un Management institutionnel qui aspire à gouverner, avec le sourire et la politesse de l’Innocence, une communauté de jouissance débarrassée du diable, autrement dit délivrée de l’Œdipe, et de la culpabilité associée pour chacun au conflit.

Seule la conscience profonde de la culpabilité peut rendre possible une réconciliation future disait je ne sais plus où Kundera, évoquant le sens partagé du tragique et de la culpabilité, l’une nouée à l’autre… Cela n’engagerait-il en rien la problématique œdipienne ?

Alors je veux bien qu’on soit aimable, trois fois courtois, mais le débat d’idée et le travail de distinction (essence du travail démocratique), dès lors qu’ils s’extraient du registre universitaire, mondain, a ses exigences, des exigences auxquelles ce forum du site Œdipe, où les dés sont pipés, ne répond plus.

(3) « Pourtant, ne la découvrons-nous pas (la psychanalyse) déjà récupérée dans la féodalité des mythes religieux modernes ? Ou bien on voudrait faire de l’analysant une espèce de vrai menteur – le fossoyeur shakespearien fouillant rigolard la tombe – et qui viendrait répéter cette idiotie qu’il est interdit d’interdire ; à la foire des Libérations sans coup férir, la psychanalyse tient boutique désormais, à l’enseigne de la clôture des lois, de la ruine des polices, de la libre amour. Ne considérons pas à la légère ces annonces du gouvernement souriant, construites pour dissimuler la tyrannie industrialiste et propager la docilité dans les bureaucraties contemporaines. Le texte freudien se trouve en fait mobilisé par les techniciens de la manipulation dans une vaste entreprise de désarmement des sujets . … La psychanalyse est appelée à servir le grand œuvre de la soumission moderne, à fournir des thèmes rassurants, à faciliter la diffusion de super-propagandes élaborées au nom des irrésistibles sciences humaines, etc… Cette méprise justifie l’arrêt de quelques pages… » ((Legendre, L’AMOUR DU CENSEUR, Essai sur l’ordre dogmatique, 1974, p.34, chap. II, Articuler une suite ; Cf. également, pour l’histoire de cet ouvrage, l’implication de Lacan dans l’affaire, la préface de la nouvelle édition de 2003


Commentaires  Forum fermé

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Daniel Pendanx, les pétitions et l’interprète.
samedi 23 février 2013 à 17h26 - par  Daniel Pendanx

pour Geneviève Boyer,

Merci pour votre lecture, et pour les commentaires et le compte-rendu de mon texte sur votre Blog que je viens de lire ; je n’ai rien à y retrancher, à y ajouter.
Vous avez par ailleurs, en quelques lignes (sur votre blog), bien défini, je le le crains, la position « politique » (désolante) de Melman en l’affaire.

Sur cette évolution du Mouvement psychanalytique, mon amie Jacquelyne Poulain-Colombier poursuit de son côté une profonde réflexion critique, libre de toute attache partisane. (Cf. sur le site des Editions du Hublot, son préambule à l’ouvrage que nous allons bientôt publier ; et cf. également ses textes récents sur son propre site : « Le Blog du chaudron psychanalytique »)
Et je ne saurai négliger l’ouverture à ce questionnement (noué au travail théorique et à la position de discours de chacun, à ce que je nomme la « politique de l’interprète » - cette notion dont les « militants » ne veulent rien entendre !) , qu’offre ici Patrick Valas.

mes amitiés,
Daniel Pendanx

jeudi 7 mars 2013 à 08h14 - par  G. Boyer

Et merci à vous pour votre assentiment qui me conforte,
pour les excellentes références à J. Poulain-Colombier,
et de rappeler qu’ici nous sommes chez Patrick Valas.

mes amitiés, Geneviève Boyer.

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Daniel Pendanx, les pétitions et l’interprète.
mardi 12 février 2013 à 10h51 - par  G Boyer

Je me suis inscrite sur le site Oedipe pour intervenir après votre article courageux., et manifester que j’allais dans votre sens.
Je ne l’ai toujours pas fait, pour des raisons que je démêle mal.
Je suis hésitante à intervenir ici, et si vous lisez ce commentaire, c’est que j’aurai cliqué là où il faut, vous utilisant par là même pour l’adresser à l’Autre.
Je suis passée de la pensée : tant mieux s’il y a des politiques, je saurai ce que je pense exactement en mesurant ma réaction à l’adoption du projet de loi, à : est-ce une Connerie monumentale, ou une Monumentale connerie ?
Est-ce que je tiens à me mettre en règle avec moi-même avant le vote, qui a lieu ce soir, en l’ouvrant à mes risques et périls, mais pas sans bénéfice ?
Je ne reviens pas sur votre texte et son expression magistrale.
La communauté homosexuelle en tant que telle, à la faveur de la discussion sur la prochaine loi, s’exprime publiquement comme elle ne l’a jamais fait. Il se trouve que de ce fait nous sommes passés d’une certaine « vision » victimaire à un ébahissement certain : ce que certains s’obstinent à voir comme une sorte de menace infondée, c’est la réalité.
Des hommes homosexuels nous ont gratifiés de déclarations lapidaires qui nous laissent ahuris et pantelants (le ventre des femmes ne diffère en rien de nos bras, et un père + une mère ça a donné Hitler).
Mais ce sont surtout des femmes qui sont données, et se montrent, et se donnent, quoi d’étonnant, en pâture au public.
Sous le titre « Deux mères, pas de père, mais des repères », une page ahurissante (gardons cette répétition) où deux femmes nous livrent dans une extrême . innocence ? que :
le tiers existe, mais il est dans le même, qu’elles n’adhèrent pas à la « vision » commune des sexes, et que leur fils est bien confronté à la différence puisque si elles ont le même kiki, elles n’ont pas la même chevelure.
Vous avez bien raison de nous rappeler que jusqu’à la fin, avec les noeuds, Lacan s’est escrimé sur la différenciation forcenée des registres.

mardi 12 février 2013 à 22h33 - par  G Boyer

Le lien n’a pas marché semble-t-il
http://homoparentalite.blogs.libera…

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Daniel Pendanx, les pétitions et l’interprète.
mercredi 30 janvier 2013 à 20h00 - par  eva talineau

merci pour cet article très intéressant, qui a le mérite aussi de montrer à quel point on est encore loin d’un véritable débat sur la question, où les arguments ne consisteraient pas à s’anathémiser les uns les autres, et à ridiculiser ceux qui s’expriment avec plus ou moins de maladresse et d’embarras comme si ce sujet était facile et qu’on pouvait s’y mouvoir en étant « d’accord avec soi-même », d’un seul tenant. Et même si la position de « botter en touche » en posant que la psychanalyse n’existe pas, mais seulement des psychanalystes, un pour un est honorable, et compréhensible, je pense tout de même que c’est en tant que psychanalystes qu’un projet de loi, comme celui qui est en cours, requiert notre attention, et que c’est à partir de ce qui fonde notre pratique que nous aurions - je mets cet « aurions » au conditionnel - à en répondre, même si c’est une exigence difficile à tenir.
Plutôt que de paraphraser votre excellent article, je vais l’accompagner d’une énonciation autre, en écho.
Mettre la différence sexuelle au cœur de ce qui fonde chez les humains le lien social, cela n’a rien de « naturaliste », mais au contraire, fonde la signifiance, pour les humains, sur une différence irréductible. L’écart homme-femme est la métaphore de ce décollement de l’identité pure, identique à elle-même, telle qu’elle aurait été léguée par les ancêtres et s’imposerait d’évidence (les sociétés dites « froides » anthropologiquement, celles qui ont précédé la nôtre). C’est à travers ce décollement, que Marcel Gauchet désigne comme « tournant axial » que l’histoire humaine a commencé comme histoire, et la Genèse, comme d’autres mythes ont « théorisé » cela, vu que depuis toujours, les humains « théorisent » les pas décisifs à travers lesquels ils construisent le symbolique qui les porte. L’humain est celui qui à la fois agit et pense, avec des effets rétroactifs de la pensée sur l’action. Ce n’est pas une chose anodine de tenir pour contingente cette pointe avancée de la transmission humaine qu’est la différence sexuelle, et de poser qu’on pourrait, sommes toutes, inventer d’autres modalités d’entrée dans la culture qui seraient « équivalentes ». On peut toujours inventer d’autres modalités d’entrer dans la culture - mais ces modalités ne sont pas « »équivalentes« à cette modalité que métaphorise la différence sexuelle - quoi qu’en dise Elisabeth Roudinesco, dans ses prises de position publiques. Car il ne s’agit pas, pour un humain »d’entrer dans la culture" - ça c’est une vision sociologique, et non analytique de la chose - mais de prendre place dans un fil de transmission, lancé depuis des millénaires, qui ne se fonde pas sur la continuité pure, mais sur un binôme paradoxal continuité/discontinuité, qui depuis l’aube des temps trouve un mode d’expression privilégié dans la différence homme/femme et les différents modes de conjonction que cette différence soutient.
La psychanalyse met au cœur du sujet et de la vie humaine cet espace de séparation d’où nait le symbolique. C’est de ce jaillissement continué que chaque analyse est comptable, dans chaque cure singulière, et il n’est pas interdit de penser qu’il en est aussi, de quelque façon, comptable dans ses prises de position dans la vie de la cité.

Encore merci pour votre article, qui touche vraiment le cœur de la question, avec intelligence et acuité.

eva talineau

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Daniel Pendanx, les pétitions et l’interprète.
mercredi 30 janvier 2013 à 18h47 - par  eva talineau

merci pour cet article, extrêmement intéressant, et qui montre, à mon sens, combien serait nécessaire parmi les analystes un véritable débat qui ne consisterait pas à anathémiser les uns ou les autres, ou à se planquer derrière des « opinions » citoyennes qui seraient déconnectées de ce dont, comme analystes, nous soutenons notre pratique.
Plutôt que de paraphraser votre excellent article, je vais l’accompagner d’une autre énonciation, qui, je pense y fait écho, même si elle ne s’y réduit pas.
mettre la différence sexuelle au cœur de ce qui fonde, chez les humains, le lien social, cela n’a rien de « naturaliste », mais au contraire, fonde la signifiance pour les humains sur une diférence irréductible. L’écart homme/femme est la métaphore de ce décollement de l’identité pure, identique à elle-même, telle qu’elle aurait été léguée par les ancêtres et s’imposerait d’évidence (anthropologiquement, les « sociétés dites froides »), décollement à travers laquelle l’histoire humaine a commencé comme histoire, ce dont les mythes religieux, comme celui de la Genèse, portent témoignage (les humains ont toujours « théorisé » les franchissements collectifs de leur histoire à travers mythes religieux et théories philosophiques). Ce n’est pas une chose anodine de tenir cela comme contingent, et de poser qu’on pourrait, sommes toutes inventer d’autres modalités d’entrée dans la « culture » qui seraient équivalentes. Car il ne s’agit pas que du passage de la nature à la culture (ce que semble soutenir E. Roudinesco, qui semble penser que là est l’enjeu du devenir humain, et qu’en ce domaine, faire confiance à l’inventivité des humains pour inventer du symbolique suffit, soyons positifs, que diable, et pas rabat-joies). Il s’agit de prendre place dans un fil de transmission, lancé depuis des millénaires, qui ne se fonde pas sur la continuité pure, mais sur un binôme continuité/discontinuité, qui, depuis l’aube des temps, trouve un mode d’expression privilégiée dans la différence homme/femme et les différents modes de conjonction que cette différence soutient.
La psychanalyse met au cœur du sujet, et de la vie humaine, cet espace de séparation d’où nait le symbolique. C’est de ce jaillissement continué que chaque psychanalyse est comptable, dans chaque cure singulière. Et il n’est pas interit de penser qu’il en est aussi, de quelque façon, comptable, dans ses prises de position dans la vie de la cité.

eva talineau

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Daniel Pendanx, les pétitions et l’interprète.
lundi 28 janvier 2013 à 11h06 - par  Giancarlo Ricci (Italy, Milano)

Gentile dott. Pendanx,
mi scuso se parlo italiano. Sono uno psicanalista di Milano di formazione lacaniana. Ho apprezzato molto il suo intervento relativo al discorso di Miller. Preoccupante che anche tra gli psicanalisti regni tanta confusione, specie in Italia. Ho scritto un libro sull’omosessualità maschile che sarà molto criticato in Italia. Le invio i miei siti : « giancarloricci.net » e « orientamentosessuale.blogspot.it ». In quest’ultimo blog mi sono permesso di riportare il suo intervento.
La ringrazio, spero di sentirla e avviare uno scambio.
Buona giornata,
Giancarlo Ricci

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