Dieu, Le retour ?

mercredi 1er février 2017
par  P. Valas

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Introduction

La vérité, dont l’usage est d’une toute spéciale difficulté est une di(t)mension mystérieuse et inexplicable. Rien ne peut permettre décisivement d’en saisir l’urgence et la nécessité chez l’être qui s’accommode si facilement de la non-vérité.

C’est elle que poursuit Freud depuis le début de son œuvre et qui jusqu’au bout le saisit et le tourmente, comme il en témoigne en écrivant son dernier grand ouvrage L’homme Moïse et la religion monothéiste (1939). Aucune considération politique ou l’intérêt d’un peuple ne saurait lui faire négliger la vérité.

Pour lui en effet le problème central de la psychanalyse est absolument inséparable d’une question fondamentale sur la façon dont la vérité entre dans la vie de l’homme. Elle y entre par la parole et c’est bien l’institution de la pratique analytique par Freud qui ouvre cette di(t)mension.

Quand Lacan formule « Moi la vérité, Je parle », il signifie qu’elle parle Je. Ainsi est établi un lien d’une puissance inégalée entre la vérité et la parole.

L’accentuation du lien entre religion et vérité s’accompagnera par la suite chez Lacan d’une certaine dépréciation de la vérité, sur laquelle il invite à reconquérir du savoir, car elle ne peut que se mi-dire, jusqu’à être qualifiée de vérité menteuse pour finir bois de chauffage.

En fin de compte on retrouvera Lacan plus préoccupé de théologie que Freud, cependant pour eux la puissance de la religion c’est son rapport à la vérité, considérant qu’elle est bien supérieure à celle de la philosophie.

Il faut bien le dire, ils ont vis-à-vis de la philosophie une attitude plus que méprisante.
Le Dieu qui pose à la psychanalyse les questions essentielles n’est pas celui du rationalisme philosophique ou scientifique, mais bien le Dieu de la religion.

Les religions

Parler de la religion au singulier prête à confusion.

En effet, la position freudienne sur la religion privilégie la tradition monothéiste au détriment de toute conception d’un commun dénominateur de la religiosité pour définir le religieux ou la religion.

Pas de définition tenable de la religion faute de la moindre unité conceptuelle de ce que l’on range sous ce terme – pas plus que pour l’art dont il n’y a ni histoire ni homogénéité.

L’originalité de la tradition freudienne tranche donc avec ce qui existe en matière d’histoire des religions, qui consiste vainement à vouloir homogénéiser des religions aussi hétérogènes et différentes qu’une religion de Bornéo, la religion confucéenne, taoïste, judaïque (pour Freud) ou chrétienne (pour Lacan La vraie Religion c’est la Catholique romaine, qu’il appelle aussi L’Église, pointée par lui comme alibi pour décourager toute tentative de définition).

Si Freud peut qualifier la religion d’être une névrose collective infantilisante, version obsessionnelle, Lacan, la reconnaît comme un discours très sophistiqué qui réalise ce qui du symbolique peut s’imaginer (RSI). Opium du peuple sans doute mais pas sans avoir aussi quelques vertus thérapeutiques incontestables.

Dire cela n’empêche pas Lacan d’épingler les trois vertus théologales de Foire, d’Archi-raté et de laisse-spère-ogne (lasciate ogni speranza).

Freud et Lacan se passionnent pour Dieu, sans se lancer pour autant dans une étude approfondie de la religion, d’ailleurs il n’est pas certain que toutes les innombrables tentatives d’autres auteurs pour en éclairer les ressorts à partir de la psychanalyse soient très convaincantes.

Le moins que l’on puisse avancer est que Dieu et religion sont loin de se confondre pour la Psychanalyse.

S’agissant du monothéisme, l’hypothèse Dieu relèverait de la structure, alors que la religion répond aux contingences de l’histoire.

Pour preuve supplémentaire la mystique que Lacan définit autrement que ne le fait la religion.
La seule chance de l’existence de Dieu c’est qu’Il — avec un grand I — jouisse, c’est qu’il soit la jouissance, L’Envers…, Seuil. p.75)

Quel Dieu ?

— L’enthousiasme de Freud

L’enthousiasme de Freud pour le Dieu unique du message biblique s’affirme dans son Moïse…
Il nous le montre composite, fabriqué dans le compromis de Cadés par artifice d’écriture et falsification combinant refoulement (Verdrängung) et démenti (Verleugnung), c’est-à-dire :

— Refoulement du Dieu sublime de Moïse (qui emprunte par filiation au Dieu du Pharaon Akhénaton), auquel se substitue l’obscur Yahvé, mais qui fait retour triomphant comme vérité par la voix des prophètes.

— Démenti du meurtre de Moïse l’égyptien, dont la personne est remplacée par Moïse le madianite.

Aux dualités bien connues, deux peuples, deux royaumes, deux noms divins (Aton/Yahvé-YHWH), Freud ajoute, deux fondations de religions, la première refoulée par l’autre, qui cependant resurgit victorieusement derrière elle plus tard ; deux fondateurs de religion nommés Moïse mais qui sont à distinguer et enfin deux meurtres, le meurtre originaire et le meurtre de Moïse. Ce dernier étant lui-même selon une voie de retour fort complexe, et non pas directe, la mise en acte réitérée du meurtre du Père de la horde - et donc du Père primitif en tant que tué.

La très complexe construction freudienne est donc toute entière sous le signe du deux, dont chacun des uns sont hétérogènes, voire antinomiques.

Pourquoi une telle construction, à entendre ici au sens conceptuel, freudien de ce terme ?

Parce que pour Freud, depuis sa découverte de l’inconscient, l’Originaire (Dieu, scène primitive, refoulement primordial, fondation du père par le meurtre du tyran de la horde primitive, etc.) ne peut se cerner que par ce qui fait retour (rêve, symptôme, souvenir-écran, etc.). On verra plus loin ce qui conditionne les modalités et les formes de ce retour.

En l’occurrence il s’agit bien pour Freud de la construction de Dieu à partir d’une opération textuelle. Freud est fidèle en cela à la tradition juive de la lettre, car il procède dans son opération de la même façon que celle du compromis de Cadés - qu’il met en cause pour aboutir à un autre résultat.

Seul l’artifice d’une écriture lui permet de passer d’une étrange dualité à la singulière unicité de Dieu qui ne se veut pas trinitaire.

— Le Dieure de Lacan

Sur la question de Dieu Lacan se démarque de Freud, et d’une certaine façon tout en le suivant il invalide sa « fabrication » de Dieu. [Il faut remarquer ici que le Dieu de Freud concerne celui du Judaïsme, alors que Lacan va l’aborder par le christianisme]

Lacan prend son départ de La Révélation du Buisson ardent dont Freud ne fait aucun cas.
YHWH y est déjà présent, avant même le meurtre supposé de Moïse.

Sur le Sinaï, les tables de la Loi, qui soulignons le ici sont les lois de la parole (« écrites de la main de Dieu » selon la tradition), sont données à Moïse par Yahvé, le Dieu qui ne dévoile pas son visage et refuse de donner son nom, mais qui se révèle à lui par ces mots : ehyèh’asher’èhyè.

Pour certaines sources il se présenterait comme Le Dieu d’Abraham d’Isaac et de Jacob.

Lacan traduit ehyèh’asher’èhyèh par « je suis ce que je suis », réfutant les traductions classiques « je suis celui qui suis »(Heidegger), ou encore « je suis celui qui est) » parce qu’elles convoquent une onto théologie.

Dieu parle, et se situe d’un dire identique à son dit dans le registre de la parole. Il n’y a que Dieu à pouvoir parler Je en vérité – c’est-à-dire, sans se contredire.

C’est la vérité qui parle Je.

La Révélation du Buisson ardent (qui n’est pas sans évoquer la jouissance et le désir et obscurs d’un Dieu caché et jaloux) creuse un écart définitif entre le Je et l’être.

C’est un Autre qui parle fondant l’Ék-sistence (hors symbolique, dans le Réel) du Je comme requise mais incertaine et se dérobant sans cesse.

À partir de là se constitue l’Autre auquel nous avons à faire comme essentiellement problématique, réservé dans son retrait - point où s’enracine la question des Noms-du-père, donc toute la question de la nomination.

Le Dieu garant de la vérité est barré (Il n’y a pas d’Autre de l’Autre), et face à celui qui dit Je il n’y a pour nous plus aucun je qui tienne.

Mais cette barre sur l’Autre est loin de signifier inexistence, puisque par là Lacan désignera plus tard rien d’autre que la jouissance de la femme, parce que assurément c’est par là que Dieu n’a pas encore fait son exit (Encore, Seuil p.78).

Il s’agit bien là du Dieu biblique de l’Exode comme référence d’origine et non pas le je suis cartésien, mais aussi il ne serait pas exclu que Lacan déchiffre le Cogito à partir du Je suis biblique.

Avant d’en venir au Dieu trinitaire, Lacan pose la distinction, sous le patronage de Pascal, entre le Dieu du message biblique (celui d’Abraham, d’Isaac, et de Jacob) et le Dieu des philosophes.

— Celui d’Aristote et son premier moteur immobile.

— Celui de Descartes qui est garant des vérités éternelles - créationniste aussi bien, idée à laquelle Lacan accorde une grande importance.

— Celui de Spinoza dont il fait la raison immanente, l’ordre de l’univers – équivalent au principe hégélien de l’identité du réel et du rationnel (adopté puis récusé par Lacan dans sa dernière définition du Réel), objet de l’amor intellectualis Dei. Ce dernier est le savoir dans le réel que même la science arrive à faire providentiel, soit comme quelque chose qu’un sujet assurerait d’être harmonique (le Génie génétique en est une des formes exténuée). Du coup la métaphysique et la religion se retrouve du même côté.

Il y a bien des points de recoupement (en topologie on parlerait de voisinage) entre le Dieu de la rationalité (garant des Vérités Éternelles, savoir dans le réel supposé le Dieu des savants et des philosophes, c’est-à-dire l’Autre non marqué) et le Dieu du message biblique repris par le christianisme.

Les Pères de l’Église en feront le Dieu trinitaire, le fondant aussi en raison, c’est-à-dire en bonne logique.

Dans un second temps, même si la double référence à ehyèh’asher’èhyè et au Christ reste centrale chez Lacan, il considère qu’il n’est pas illégitime de donner au Dieu qui parle comme assise le Dieu des philosophes et des savants, auquel tout le monde croit, même si ce Dieu est un peu malade (Lacan, La méprise su sujet-supposé-savoir, Scilicet no1).

Seule la psychanalyse peut le destituer ce Sujet monumental, mais pas le savoir dans le réel.

Il en résultera par la réalisation de l’amour de transfert, qui est amour adressé au savoir, l’émergence d’un désir nouveau, inédit, pour le sujet, le désir de savoir. Savoir à inventer, comme le fait Lacan, entre autres inventions, par la déclinaison qu’il fait des nouveaux noms divins que sont les Noms-du-père, S de A barré, la jouissance de la femme, etc.

Lacan va se rallier au Dieu trinitaire (qui n’est pas borroméen) non sans lui faire subir encore quelques misères :

— Dieu c’est le Dire, pour un peu Dieu c’est dieure, c’est ce qui fait être la vérité, ce qui en décide, à sa tête. Il suffit de dieure comme moi. C’est la vérité, pas moyen d’y échapper. Si Dieure me trompe, tant pis, c’est la vérité par le décret du dieure, la vérité en or.
(La Troisième, Rome 1974).

— Dieu est de l’ordre de la Super-chérie.

— Dieu ne croit pas en Dieu, en quoi Dieu est inconscient. Il ek-siste, il est l’ek-sistence par excellence. C’est-à-dire qu’en somme il est le refoulement en personne, il est même la personne supposée au refoulement. Et c’est en ça que la religion qui l’affirme est vraie. (RSI,17 déc. 74).

Quel retour ?

Mon propos ne concerne que celui de Dieu, sur fond de retour du religieux qui ne sera pas traité ici, non sans rappeler que Lacan annoncera le triomphe de la religion à Rome en 1974.

Je me dispenserai ainsi de parler de l’organisation religieuse de certains groupements psychanalytiques. De même, des raisons, autres que politiques ou commerciales, de la montée vertigineuse de fondamentalismes très ravageant.

S’agissant de la Religion du Livre (l’Islam) dont le texte est fixé (C’est écrit pour toujours), je me sens incompétent pour en parler d’un point de vue analytique, n’ayant pour ma part aucune expérience clinique de sujets élevés dans la tradition islamique. J’ignore tout de cette religion et notamment la façon dont le Dieu d’Abraham d’Isaac et de Jacob a pu devenir Allah. Je suis prêt à me laisser enseigner par qui saura le faire sans prosélytisme excessif.

a) Pour Freud

Ce qui fait retour non sans déformation et déplacement dépend du processus (en fait une véritable stratégie subjective) dont la chose a subi l’effectuation. Très schématiquement, La Chose freudienne, qui conjoint désir et jouissance, est liée au mythe du Père de la Horde. Son meurtre équivaut à la castration symbolique et peut être, forclos, démenti ou refoulé.

— À la Verwerfung de ce qui a été forclos, répond le retour dans le Réel des dieulires de la science ou du Dieu de Schreber, par les voix de l’hallucination- un Dieu d’autant plus intrusif qu’il est étranger au sujet.

— À la Verleugnung (démenti du Réel), répond le retour dans l’Imaginaire sous la forme des Idoles et des Dieux-fétiches, pas seulement pour les sectes.

— À la Verdrängung (refoulement), répond le retour dans le Symbolique du refoulé, celui du Dieu sublime de Moïse, écranté pour un temps par le Dieu des volcans, mais qui triomphe par la voix des prophètes.

Ce dernier Dieu est le Dieu-symptôme dont la figure est centrale dans la perspective du monothéisme.

À suivre Freud ce qui fait retour dans la religion c’est l’amour du père.
Il met ainsi la psychanalyse dans un voisinage sans égal avec la religion.

Lacan le lui reprochera. En sauvant le père dont la signification change avec son Moïse… (Ce que je ne développerai pas ici), Freud sauve la religion, le christocentrisme de son élaboration est patent. Il n’est pas sur que Freud aurait apprécié cette pointe de Lacan, qui souligne en même temps par là que c’est la marque d’une critique que Freud (un bon juif pas à la page) adresse au judaïsme.

Reste que seule la voie freudienne poursuit jusqu’à son terme l’œuvre de révéler ce dont il s’agit dans le crime primitif et la Loi primordiale qui en découle.

b) Pour Lacan

La question d’un retour de Dieu, à supposer qu’il soit mort ne se pose pas dans les mêmes termes.

Si le Dieu-totem autant que tabou a été tué, c’est qu’il est mort depuis toujours et par là il est intuable . Par son biais a pu venir au jour la vérité sur le Dieu tout amour.

Si Freud traite le Christ avec beaucoup de désinvolture parce que sa réalité matérielle et historique resterait marquée d’une interrogation, Lacan va puiser dans les Évangiles - la positivité historique du christianisme étant mise par lui au compte de Saint Paul.

Dieu a été réellement tué par les hommes, la chose ayant été reproduite, le meurtre primitif a été racheté.

Le drame de la passion du Christ, porteur de la mort de Dieu, montre qu’il y a une résurrection au-delà de la mort. C’est-à-dire que l’homme qui a incarné la mort de Dieu est toujours là. Il est toujours là avec ce commandement qui ordonne d’aimer Dieu.

Dieu le Père dans sa mythologie à lui le Fils (Éthique, Seuil p. 205).

La vérité trouva sa voie par celui que l’Écriture appelle sans doute Le Verbe, mais aussi Le Fils de l’homme, avouant ainsi la nature humaine du Père (Éthique 23/6/1960).

Le mystère de l’Eucharistie vient encore en plus donner corps et sang, c’est le cas de le dire, à Dieu.

Pour Lacan, Dieu est inconscient, il est la personne supposée refoulement originaire.

L’ek-sistence de l’Urverdrängt, est quelque chose d’affirmé par l’analyse en tant qu’il est premier irréductible, jamais levé. On ne peut donc pas dire que le retour du refoulé originaire se produise au sein du Symbolique comme le ferait le refoulement secondaire, puisqu’il en est lui-même l’auteur. S’il revient, ce ne saurait être que dans le Réel et c’est en tant que tel qu’il se manifeste (L’insu que sait…, 8 fév. 1977).

Dieure, ainsi nommé par Lacan, lui permet d’affirmer que tant que ça dira l’hypothèse Dieu sera là. En quelque sorte le retour de Dieu ne se pose pas puisqu’il n’est jamais parti.

L’athéisme pour la psychanalyse

a) Pour Freud, l’athéisme va de soi, ce n’est pas pour lui une préoccupation centrale. Il lui suffit de rester fidèle à la tradition juive de la lettre et de suivre sa pente en se laissant porter par son mouvement.

Le judaïsme est en effet une religion de l’étude des textes qu’il ne faut jamais fixer, ils sont sans cesse à interpréter. Elle fait plus appel au savoir qu’à la foi et à la croyance (l’Islam étant la religion du livre définitivement écrit).

De ce fait Freud s’illusionne sur l’avenir de la religion. Il mise sur la Science pour la dissiper. Il est vrai qu’il a à faire avec la montée en puissance d’une science moderne pleine de promesse, ne pouvant pas encore constater ses effets ravageant, alors qu’ils sont pour nous une réalité quotidienne.

Freud méconnaissant le christianisme tombe dans ses chausse-trapes. Imitant le Christ selon Lacan il sauve le Père mais sans y mettre toute la gomme et par voie de retour il conforte la religion.

b) Pour Lacan, qui a à faire avec la religion catholique l’athéisme se pose en d’autres termes parce que, La vraie Religion repose sur les mystères et donc essentiellement sur la foi et la croyance et non pas sur le savoir.

Aussi dit-il Que vous y croyiez ou pas, gardez ça dans votre petit creux d’oreille – moi je n’y crois pas, mais on s’en fout, pour ceux qui y croient c’est la même chose – que vous y croyiez ou pas à Dieu, dites-vous bien qu’avec Dieu dans tous les cas, qu’on y croit ou qu’on y croit pas, il faut compter ; c’est absolument inévitable. Le savoir du psychanalyste, 1/6/1972, (inédit).

Lacan critique tous les noms divins produits par la philosophie, le Bien, l’Être, la Raison, l’Un, le Parfait ne retenant que celui de l’Autre que la tradition lègue sous le nom de Dieu. Tour à tour pour la psychanalyse :

— Autre du savoir et de la rationalité des philosophes et des savants (mis en acte dans la psychanalyse sous la forme du sujet supposé savoir).

— Autre de la parole rapporté au Dieu qui parle du message biblique, soit un Autre barré qui manque et par conséquent désire. Que Dieu soit aussi nommé la Jouissance peut d’abord s’autoriser d’Aristote avant que de la mystique.

Cette barre sur l’Autre est loin de signifier inexistence, puisque par là Lacan (S de grand A barré) désignera plus tard rien d’autre que la jouissance de la femme, parce que assurément c’est par là que Dieu n’a pas encore fait son exit (Encore, Seuil p.78).

— Tout au long de son enseignement Lacan se confrontera au Dieu amour du christianisme et explicitement au Dieu trinitaire lorsqu’il s’intéresse aux nœuds.

Les voies d’accès à l’athéisme sont donc nombreuses pour Lacan. Il recommande, en dehors de la cure, de se laisser enseigner par les théologiens qui sont pour lui de véritables athées au point qu’il demande la création d’une chaire de théologie à l’Université. La lecture des Pères de l’Église lui semble utile, notamment Saint Thomas qui le fait se plier en huit par terre.
Enfin et surtout les mystiques, dont les jaculations ne sont ni du bavardage, ni du verbiage mais ce qu’on peut lire de mieux, y ajoutant les Écrits de Jacques Lacan (Encore, 4e de couverture).
D’autres noms divins sont à produire, après les siens que sont les Noms-du père, la jouissance réelle de La femme qui n’existe pas, Dieure, Super-chérie, l’Uverdrängt, etc.

c) L’analyste doit-il être athée ou non ?

La cure psychanalytique menée à son terme logique devrait faire le sujet athée pour autant qu’il ne se contredise à tout bout de champ (Conférence aux USA, Yale University, 1975).

En fin de compte, l’athéisme psychanalytique ne repose pas sur l’inexistence de Dieu, mais paradoxalement sur celle de son Ek-sistence, démontrée par un savoir dans le réel dont il n’y a pas de sujet supposé. Un savoir qui s’invente, chu de son propre pour le sujet dans sa visée de la différence absolue, c’est-à-dire en collant toujours plus à la structure de son Sinthome.

Si Freud sauve le Père et la religion en même temps, Lacan lui sauve Dieu. Il sauve Dieu pour fonder une Dio-logie, parce que pour se passer de Dieu il faut apprendre à s’en servir.

Après avoir affirmé que la psychanalyse n’avait rien ni pour ni contre la religion (Suberversion…), Lacan reviendra au choix freudien entre psychanalyse ou religion, dressant un sombre horizon.

La Religion est increvable. Si elle triomphe cela signera l’échec de la psychanalyse.

Il annonce aussi un retour funeste du religieux, comme en témoigne la montée en puissance de fondamentalismes religieux particulièrement ravageant et autrement plus puissants à ce jour que ceux de la chrétienté.

Une Diologie est possible qui n’exige pas de croire, mais de mettre à jour la structure.

Patrick Valas, 22 juillet 2009.

Je dois ce travail aux nombreux travaux de mon ami François Balmès.


Commentaires  Forum fermé

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Dieu, Le retour ?
lundi 31 octobre 2016 à 11h25 - par  Jeanne Corbière

Pourquoi est-ce qu’il a dit que les catholiques étaient ravis de la transgression des autres pour eux.
C’est la formulation ?