La famille conjugale moderne. Du nouveau en 2013 : le mariage pour tous ?

dimanche 1er décembre 2013
par  P. Valas

JPEG - 180.2 ko
 

Le 31 janvier 2013

Freud écrivait dans ses 3 essais sur la sexualité (1905) :

"Il y a des normes sociales, faute de toute norme sexuelle". Sigmund Freud.

Du point de vue des structures élémentaires de la parenté, on peut lui donner une suite paradoxale, en affirmant que cette revendication "mariage pour tous", est la confirmation de la valeur absolue de "la famille conjugale moderne" qui doit tenir compte de la subjectivité de notre temps.

Homme ou femme, après tout ne sont que des signifiants, dont se déduit qu’il y a un impossible à savoir sur le sexe.

A cet égard, les formules de la sexuation, signifient que le sujet fait le choix (surdéterminé) de son identité sexuée, indépendamment de son sexe anatomique.

Le mariage pour tous ?

De Lacan :
Patrick Valas
4 février 2016 ·

Gender

"…vous aurez peut-être le temps de lire quelque chose.
Pour une fois que je conseille un livre, ça fera monter le tirage, qui s’appelle Sex und Gender… and Gender…c’est en anglais, pardon. C’est d’un nommé STOLLER(1).
C’est très intéressant à lire, d’abord parce que ça donne sur un sujet important, celui des transsexualistes, un certain nombre de cas très bien observés avec leurs corrélats familiaux.
Vous savez peut-être que le transsexualisme, ça consiste très précisément en un désir très énergique de passer par tous les moyens à l’autre sexe, fût-ce à se faire opérer, quand on est du côté mâle.
Voilà !
Ce transsexualisme, avec les coordonnées, les observations qui sont là, vous y apprendrez certainement beaucoup de choses, car ce sont des observations tout à fait utilisables.
Vous y apprendrez également ceci, le complet… le caractère complètement inopérant de l’appareil dialectique avec lequel l’auteur de ce livre traite ces questions, et qui font que surgissent tout à fait directement les plus grandes difficultés qu’il rencontre pour expliquer ses cas.
Une des choses les plus surprenantes, c’est que la face psychotique de ces cas est complètement éludée par lui, faute bien entendu de tout repère, la forclusion lacanienne ne lui étant jamais parvenue aux oreilles, ce qui explique tout de suite et très aisément la forme de ces cas.
Mais qu’importe !
L’important est ceci, c’est que pour parler d’identité de genre, ce qui n’est rien d’autre que ce que je viens d’exprimer comme ce terme : « l’homme et la femme », il est clair que la question n’est posée de ce qui en surgit précocement qu’à partir de ceci : qu’à l’âge adulte, il est du destin des êtres parlants de se répartir entre hommes et femmes et que pour comprendre l’accent qui est mis sur ces choses, sur cette instance, il faut se rendre compte que ce qui définit « l’homme » c’est son rapport à « la femme », et inversement.
Que rien ne nous permet dans ces définitions de l’homme et de la femme, de les abstraire de l’expérience parlante complète, jusques et y compris dans les institutions où elles s’expriment, à savoir le mariage.
Si on ne comprend pas qu’il s’agit, à l’âge adulte, de faire-homme, que c’est cela qui constitue la relation à l’autre partie, que c’est à la lumière, au départ, en partant de ceci qui constitue une relation fondamentale, qu’est interrogé tout ce qui dans le comportement de l’enfant peut être interprété comme s’orientant vers ce faire-homme par exemple, et que de ce faire-homme, l’un des corrélats essentiels, c’est de faire signe à la fille qu’on l’est, que nous nous trouvons pour tout dire placés d’emblée dans la dimension du semblant, mais aussi bien… tout en témoigne, y compris les références qui sont communes, qui traînent partout …à la parade sexuelle chez les mammifères supérieurs principalement, mais aussi bien chez les… dans un très très grand nombre de vues que nous pouvons avoir très très loin dans le phylum animal, qui montre le caractère essentiel, dans le rapport sexuel, de quelque chose qu’il convient parfaitement de limiter au niveau où nous le touchons, qui n’a rien à faire ni avec un niveau cellulaire, qu’il soit
chromosomique ou pas, ni avec un niveau organique, qu’il s’agisse ou non de l’ambiguïté de tel ou tel tractus concernant la gonade, c’est à savoir un niveau éthologique qui est celui-ci : celui proprement d’un semblant.
C’est en tant que le mâle… le mâle le plus souvent, la femelle n’en est pas absente puisqu’elle est précisément le sujet qui est atteint par cette parade …c’est en tant qu’il y a parade que quelque chose qui s’appelle copulation sexuelle, sans doute, dans sa fonction, mais qui trouve son statut d’éléments d’identité particuliers.
Il est certain que le comportement sexuel humain trouve référence aisément dans cette parade telle qu’elle est définie au niveau animal.
Il est certain que le comportement sexuel humain consiste dans un certain maintien de ce semblant animal.
La seule chose qui l’en différencie, c’est que ce semblant soit véhiculé dans un discours, et que c’est à ce niveau de discours… à ce niveau de discours seulement …qu’il est porté vers - permettez-moi - quelque effet qui ne serait pas du semblant.
Ça veut dire que, au lieu d’avoir l’exquise courtoisie animale, il arrive, il arrive aux hommes de violer une femme, ou inversement.
Aux limites du discours… en tant qu’il s’efforce de faire tenir le même semblant …il y a de temps en temps du réel : c’est ce qu’on appelle le passage à l’acte, je ne vois pas de meilleur endroit pour désigner ce que ça veut dire.
Observez que dans la plupart des cas, le passage à l’acte est soigneusement évité.
Ça n’arrive que par accident, et c’est bien là aussi une occasion
d’éclairer ce qu’il en est de ce que je différencie depuis longtemps du passage à l’acte, à savoir l’acting out, faire passer le semblant sur la scène, le monter à la hauteur de la scène, en faire exemple,
voilà ce qui dans cet ordre s’appelle l’acting out.
On appelle ça encore la passion.
JLacan, 20 janvier 1971, "D’un discours qui ne serait pas du semblant".

1 Robert Jesse Stoller : Recherches sur l’identité sexuelle à partir du transsexualisme, Gallimard , 1979

Réponse à l’article La famille conjugale moderne. Du nouveau en 2013 : le mariage pour tous ?

Cher Patrick,

Lisant tes quelques lignes réintroduisant cette intervention sur “la famille conjugale moderne” , il m’a semblé que tu te prêtais là, un peu d’ailleurs contre l’esprit général de ton propos, à cette disons facilité ou réduction théorique sur la base de quoi je vois le « lacanisme » se constituer comme un discours (avec sa dogmaticité et ses propres « figures », sa dimension normative irréductible) qui au final vient entretenir, culturellement et politiquement entretenir, l’avenir de l’illusion – toute l’actualité (confusionnelle) de l’anti-doxa. Je vais essayer de m’en expliquer.

Le déchaînement présent du groupe millerien, avec son agit-prop. permanente (journal ” Quotidien Lacan” s.v.p., meeting avec compagnons de route et v.i.p. du Spectacle, pétitions, publication), est la pointe extrême de cela, y scotchant bien des suiveurs.

D’aucuns, perplexes, relevaient récemment lors d’un colloque (concernant le travail social de la protection administrative et judiciaire de l’enfance) : plus il y a de réparateurs plus il semble y avoir de pannes… Et puis Le Monde titrait sur le naufrage de la Protection Judiciaire de la Jeunesse. Oui, la production des Dépanneurs, au service du positivisme éducatif, du thérapeutisme – un positivisme qui vise à contourner sinon à réduire le rapport au réel, à l’impossible, participe du problème… Le problème, éternel, du « malaise » dans l’éducation, la transmission de la Loi n’est-ce pas. [Moi je suis par exemple depuis longtemps, face à ce positivisme qui entretient la dite “perte des repères”, ne serait-ce qu’au titre de la dénoncer, pour deux mesures révolutionnaires phares : 1) fin des formations universitaires de « psychologues » (imagine un peu comment une telle proposition peut-être reçue aujourd’hui !), et 2) ne plus faire des juges des enfants les juges de l’Assistance éducative. Et là je sais, pour être bien placé, pourquoi, de celle-ci, nul n’en veut. Tous tiennent tant au juge, au juge non juge s’entend , et le juge lui-même si peu au juge-interprète ! L’homoparentalité institutionnelle, nous y sommes depuis si longtemps dedans. L’affaire du « mariage gay », c’est la cerise sur le gâteau, comme une dernière pierre à l’édifice.]

Concernant le dit naufrage des repères – et “naufrage” il y a (mais l’ancien temps avait ses propres folies !) – il conviendrait, si tout du moins on prétend à une position d’interprète, ne serait-ce que vis-à-vis du législateur et de ses concitoyens – d’aborder les choses dans une toute autre rigueur et liberté. Mais voilà qui exige de soutenir une voie qui ne soit pas d’orgueil (d’orgueil éducatif et thérapeutique, d’orgueil politique, soit-il « psychanalytique ») , une voie, comme disait aussi notre bon Freud, entre Charybde et Scylla : entre le Charybde du vieux juridisme (ou familialisme social) et le Scylla de l’anti-œdipisme, de l’anti-doxa.

Mais je veux d’abord ici rapporter, marquant très vite le chemin de réflexion qui m’a engagé dans la voie où je suis aujourd’hui, et par là faire peut-être mieux entendre mon propos, qu’il y a eu un temps de ce trajet, temps maintenant quelque peu lointain, où m’extirpant du psychologisme (de cette idée par exemple que pour qu’il y ait du tiers, du père, dans une famille, il fallait injecter du père concret, un tiers concret dans la scène du cas), commençant à me saisir du fait que la mise en œuvre du nom-du-père, de l’espace de séparation, de la fonction paternelle, pouvait être le fait « d’un-père » de quelque sexe soit-il (cf. Lacan dans les Ecrits), j’en étais venu à penser que les couples de même sexe (la réflexion portait alors sur ce qui se passait chez nos amis suédois, toujours en avance n’est-ce pas), pouvaient être légitimés sans encombre… Ma vie, ma propre expérience de praticien, mon chemin d’élaboration et de pensée, l’apport des Legendre, m’ont porté à me saisir du lien intrinsèque de la subjectivation (de la sublimation de l’Œdipe) avec les fictions institutionnelles, les montages du Droit : j’ai alors compris qu’il s’agissait, non de révolutionner et de déconstruire les montages, mais, comme du père, ainsi qu’on le prête à Lacan, il faut savoir s’en servir. Mais on n’apprend à s’en servir que si l’on se saisit du fait, du fait symbolique, je résume et simplifie, que du tiers il n’y a que tiers exclu , et que de cela, en regard de la logique du fantasme (logique d’indifférenciation et de “meurtre”), le Droit (et l’institutionnalité) doivent être comptables - sinon à verser vers une forme ou une autre de tyrannie.

Maintenant, mes remarques ; celles-ci, données à l’état brut, portent donc sur les deux lignes suivantes de ton introduction récente :

« Homme ou femme, après tout ne sont que des signifiants, dont se déduit qu’il y a un impossible à savoir sur le sexe. A cet égard, les formules de la sexuation, signifient que le sujet fait le choix (surdéterminé) de son identité sexuée, indépendamment de son sexe anatomique. »

Les mots mère et père ne sont pas de purs signifiants, disons poétiques, flottants au gré du désir, ni davantage, l’un ou l’autre, un signifiant absolu, tel le Phallus ou le Totem. Au titre du signifiant ils s’inscrivent donc dans ce lien constitutif du mot qui unit le signifiant au signifié, soit, comme y est souvent revenu Legendre dans ce « lien constitutif de la dette du mot, par laquelle le sujet parlant s’inscrit dans l’institution du langage ; … » (cf. note p.149 de Dieu au miroir) .

Poser que homme ou femme “ne sont que des signifiants” », qui seraient au fond comme à disposition du sujet (lequel choisirait, comme dans la transsexualité), c’est hypostasier le signifiant, le surinvestir, en le désarrimant de la structure ternaire du mot : signifié / (écart) / signifiant. Et c’est dès lors s’engager peu ou prou dans la voie (normative occulte) du sujet libre de son choix, le sujet postmoderne, auto-fondé.

Tu prends toutefois, toi, la précaution d’indiquer entre parenthèses que ce choix est surdéterminé… ; oui, mais “surdéterminé” par quoi ? Je dirai de mon côté, tout autant surdéterminé par le discours familial dans lequel il est advenu que surdéterminé par l’ordre du signe, de légalité du signe (du lien de dette du signifiant au signifié, de la « loi du langage ») qui institue le sujet à sa place de droit. C’est dans ce désarrimage du signifiant à l’ordre légal du signe, du mot, que le bât blesse dans le « lacanisme ». Mais cette proposition (soulignant une faille présente déjà, je le pense avec Legendre, dans l’orientation de Lacan) ne me fait pas négliger l’autre travers (garde toi à gauche, garde toi à droite mon frère) : celui de la réduction du signifiant sur le signifié (concomitante à la réduction du mot sur la chose) – réduction des registres qui est celle de tout “familialisme”, de toute conception objectiviste de la famille, celle là même qui sous-tend d’ailleurs la supposée famille monoparentale. Je le répète : il n’y a pas de famille monoparentale, mais des familles mono-linéaires, ce qui est tout autre chose. Et nous faire croire qu’il y a famille homoparentale, légitimer en droit cela – autrement dit réduire, et c’est là le point commun de tant de discours apparemment opposés, la famille pour l’animal parlant à la nature ou au social – ouvre aux nouvelles dé-symbolisations… Ce qui est, sous les grandes proclamations de « l’amour » et de « l’égalité », promouvoir la nouvelle folie politique.

[J’ai insisté sur le forum du site Oedipe, semble-t-il dans le désert, et plus encore, en levant grande hostilité pour ce crime de lèse-majesté universitaire, sur le fait que les analystes soient aujourd’hui à la traîne de l’anthropologie sociale (Héritier, Godelier), qu’ils préfèrent celle-ci, et pour quelle Cause ?, à l’anthropologie dogmatique… Il conviendrait pourtant de reprendre cette affaire : montrer, dans le fil de ce que Lacan en a ouvert dans sa critique de la « sociologie environnementale”, combien les conceptions objectivistes de la sociologie ont continué d’infiltrer les milieux de la psychanalyse. Quand je pense que des analystes prennent au sérieux par exemple les confusions de registres récurrentes d’Irène Théry, ou, sans autre réplique, le comparatisme « social » et « sexuel » entre les bonobos et nous, de Godelier ! Etc. ]

Dès lors que l’écart du signifiant au signifié est préservé, il y a du « jeu », du jeu possible avec les mots bien sûr, mais cet écart, ce jeu, ils n’existent que d’une liaison, et que d’un certain « ordre » (l’ordre que Lacan avait en vue, ainsi que le rappelle Melman dans le propos que j’ai rapporté dans mon texte Le mariage gay, les pétitions et l’interprète).

Chaque figure fondatrice (mère ou père), pour relever de cet ordre (de la loi du langage), et plus précisément encore, de la structure ternaire même du signe (signifié/signifiant) – en laquelle s’implique le lien de légalité, de dette, du signifiant au signifié –, chaque figure oppose à tout sujet, au fantasme de tout sujet, en tant que telle, le mur de cette première institution qu’est le langage, le mur, dira Legendre, de la dogmaticité : c’est le mur de l’institution des images (Dieu au miroir, p.148 et ss.) – mur qui soutient ce qu’on nomme Interdit. A charge pour les interprètes, dans leur propre œuvre « parentale » médiane, sur des plans distincts (dont celui, spécifique, mais rattachable à l’œuvre « parentale » médiane générale, de l’analyste) de faire valoir cet Interdit – soit l’écart, l’espace de séparation entre le signifiant et le signifié, entre les figures elles-mêmes –, en en payant d’abord pour eux-mêmes le prix subjectif. A partir de quoi le sujet rencontre les conditions d’entrée, pour son propre compte de sujet, dans la dialectisation-subjectivation de l’écart, de la « séparation », celle de son rapport, toujours boiteux, au Réel.

Chaque figure (Mère ou Père), relevant de la loi du langage, du lien de dette du signifiant au signifié [lien de dette qui s’ordonne à ce le lien de dette homme-père, mère-femme dont le noyau du droit civil a été jusqu’à ce jour comptable], renvoie le sujet à ce dont justement le langage le coupe, le sépare : du reflet de lui-même et de l’opacité de ce que nous appelons “nature”.

Une figure n’existe (dans le champ normatif du principe de Raison, de contradiction, du tiers exclu) que dans la distinction et la liaison de l’autre figure, que celle-ci soit incarnée ou non ! Et de ce fait toute figure, dès lors qu’elle est soutenue, habitée en tant que telle (= en tant que figure symbolique) par le sujet, participe, dans la scène de la représentation fondatrice, de l’institution de l’écart, soit de la coupure, de la séparation. Ce qui permet de dire par exemple qu’une mère et son enfant, dès lors qu’ils se trouvent par l’état civil référés l’un et l’autre, de leur place, à une même fiction fondatrice, non faussée [fiction dont le rite du mariage a vocation à être comptable, pour les mariés comme pour les non mariés] - cet enfant étant ainsi lié, pour son propre compte de sujet, à la catégorie du père, soit-elle celle, ultime, du père inconnu, catégorie qui ne saurait être à disposition, comme tout y tend, du « désir » de la mère - et dès lors que la mère se trouve conviée en droit à habiter subjectivement son propre lien de ligne, c’est déjà une famille, pas une famille décomplétée, monoparentale !

Une figure parentale n’existe comme telle (comme fiction distincte et liée) que nouée dans un rapport d’ordre (langagier, de légalité) avec une autre figure : dans ce rapport dissymétrique au Phallus qu’est celui de la différence des sexes. Dès lors qu’une figure existe comme telle, autrement dit, dès lors qu’un parent est référé (à l’axe phallique, selon son sexe), l’autre figure parentale existe comme telle aussi, que l’autre parent soit présent ou absent.

C’est de cette existence là, de ce rapport là entre les figures parentales, dont la culture et le droit sont comptables, que dépend, comme disait Lacan, le sort psychologique de l’enfant, que dépendent les conditions du procès subjectif de distinction de soi et de soi-même , de soi et de l’autre, l’autre en soi.

C’est de ce « rapport entre les figures », de ce cadre de représentation, noué au Grand Autre (à la Référence totémique), dont tout interprète, et donc également tout analyste, non seulement tire sa légitimité dans le transfert, mais est comptable.

Pour reprendre un propos sensible d’Eva Talineau (que je remercie là de sa lecture et du rebond à mon texte), très approprié à mes yeux pour aborder la responsabilité politique (je n’ose dire « éthique ») des analystes et autres interprètes, je dirai qu’il s’agit en effet de savoir de quoi, par rapport à une telle affaire, les interprètes sont « comptables ». Je dis que nous sommes comptables de « dire » quel est le cadre qui nous fonde comme interprète, autrement dit comptables de dire et de témoigner de la symbolisation des figures qui nous fonde à « s’autoriser que de soi-même », ou comme disait Winnicott, « d’être sa propre figure parentale »… C’est bien de saisir (ainsi que tout mon parcours m’y a conduit) ce qu’il en est des fondements généalogiques-juridiques de la clinique - du mythe et du cadre de la représentation “oedipienne” (“cadre de légalité de la clinique”) qui fondent et légitiment toute pratique d’interprète -, que nous pouvons intervenir en raison, et en interprètes, dans cette affaire dite du “mariage pour tous”. C’est d’abord de cela, de cette exigence d’une fiction fondatrice équilibrée, non faussée, symbolique - à laquelle chacun, en regard de ses surdéterminations, familiales, culturelles, se rapporte comme il peut - , que nous avons à répondre dans la Cité, même si c’est une exigence difficile à tenir .

Difficile car nous touchons là tout à la fois 1) à la position de l’interprète dans la Cité, ou plus exactement, à la position de l’interprète dans le mythe institutionnel œdipien [tu as cher Patrick notait de ton côté, comme je l’avais indiqué sur le forum du site Œdipe, que « cette revendication « mariage pour tous » est la confirmation de la valeur absolue de la « famille conjugale moderne » , autrement dit, de la valeur générique, absolue, toujours aussi actuelle (non réductible à je ne sais quelle viennoiserie ou ancien temps !, du mythe œdipien qui sous-tend cette représentation de la « famille conjugale moderne », et 2) difficile parce que la distinction et l’articulation des registres, l’articulation du jeu des identifications inconscientes aux catégories juridiques, langagières de la Filiation, aux montages du Droit, restent aujourd’hui pour le moins sous-investie, incomprises. Ce dont témoigne la façon dont le propre apport d’Alexandra Papageorgiou-Legendre (dans Filiation, Leçons IV), sur les fondements généalogiques de la psychanalyse, est mis sous le boisseau, non lu, non discuté… Sinon dans quelques propos caricaturaux.

J’en reste là, te remerciant de l’occasion offerte de creuser tranquillement une controverse, certes difficile, mais d’autant plus difficile qu’il devient impossible de la soutenir hors ces enjeux de communauté, inavouables, qui semblent aujourd’hui commander les analystes. Des enjeux pourtant forts “visibles”, tout du moins à l’interprète et au fou, au fou du Roi-Sujet, of course.

Amicalement,

Daniel Pendanx

LA FAMILLE CONJUGALE MODERNE


 

Sur les rapports du mariage et de l’amour, il y a toute une tradition littéraire, française notamment, qui à travers l’histoire a traité ce sujet un peu à la légère sur le mode d’un badinage piquant voire cynique plus ou moins marivaudant. Pourtant la chose mérite d’être reprise sous un angle plus sérieux Comme l’ont fait Freud, Lacan, Lévi-Strauss et bien d’autres auteurs.

Dans son séminaire Le Moi… [1] Lacan rappelle comment Proudhon [2] qui avait réfléchi sur la condition humaine a tenté d’approcher de cette chose à la fois si tenace et en même temps si fragile qui s’appelle la fidélité. Il formulait la question ainsi :
"Qu’est-ce qui peut bien motiver la fidélité en dehors de la parole donnée [3] ?"

On rappelle ici que dans son Discours de Rome de 1953 [4] Lacan souligne les termes de don, grâce, soumission, qui scelleront « la fortune » du sujet s’il consent aux lois de la parole donnée. Celle-ci en effet conditionne le pacte de la reconnaissance, fonde l’alliance et rend possible l’échange, en tant qu’elle humanise la vie du parlêtre.

Le seul médium de la psychanalyse est la parole, et non pas le transfert qui n’est pas un moyen mais un résultat, au sens premier de ce terme apparu chez Feud dans La Traumdeutung (Soit le transfert des éléments d’un discours à un autre).
La psychanalyse a démontré quelle fortune heureuse ou malheureuse, hélas aussi parfois, les paroles fondamentales surdéterminent les choix du sujet et quels ravages peuvent elles produire sur lui, si même à son insu, elles sont falsifiées, détournées ou non tenues.

On peut faire remarquer que depuis 25 ans que l’Ecole freudienne de Paris a été dissoute, la majeure partie des conflits entre les psychanalystes qui se réclament de Lacan sont caractérisés par le fait que les lois de la parole ne sont pas respectées entre eux, faisant rupture du lien aléatoire et fragile du transfert qui devrait faire lien social entre eux, en conséquence de quoi ce sont les enjeux de pouvoir qui viennent le plus souvent au premier plan, venant parasiter les débats théoriques. Il faut y être particulièrement attentif.

Proudhon va contre l’illusion romantique de l’amour parfait, pour lequel chacun des partenaires prend pour l’autre une valeur idéale dans l’engagement humain.
Dans sa tentative de donner statut à la fidélité dans le mariage, il trouve une solution dans quelque chose qui ne peut être reconnu que comme un pacte symbolique. Ce pacte symbolique, celui de la parole, va bien au-delà de la relation individuelle et de ses vicissitudes imaginaires.

Il y a bien sûr un conflit de structure entre ce pacte symbolique et les relations libidinales. Ces dernières s’ordonnant dans le registre du narcissisme, dont la consistance imaginaire est prégnante.
Si l’amour s’inscrit dans le cadre du narcissisme, en cela il est toujours réciproque puisque aimer c’est d’abord s’aimer soi-même (en fait Lacan va modifier sa définition de l’amour pour le corréler aux trois registres de l’Imaginaire du Symbolique et du Réel).
Il y a bien un versant symbolique de l’amour, car « l’amour vrai » pour Lacan, l’amour authentique vise à la réalisation de l’être du sujet, par le renoncement à la capture de son objet. En cela il est aussi touche du Réel.
Ainsi aimer ne veut pas dire que l’autre vous aimera automatiquement en retour, d’autant plus qu’aimer c’est donner à l’autre ce que l’on a pas et qui n’en veut pas.
Il en résulte que quand le sujet dit à sa partenaire :
« tu es ma femme », il exprime son désir par son message qu’il reçoit de l’autre sous une forme inversée, puisque que la réponse attendue serait un « je suis ton homme ».
Cela n’est possible que pour autant qu’il a reconnu le pacte symbolique, garanti par l’Autre qui l’antécéde logiquement et le fonde légitimement par ce dire que « je suis ton homme » qu’il profère.

C’est bien ce que Proudhon a pu approcher, a savoir que : la fidélité de l’époux et de l’épouse, tient non pas au lien particulier de celle-ci à celui-là, même idéalisé l’une par l’autre et réciproquement. Cette fidélité tient donc à un lien plus profond qui unit :

- Une femme à travers son homme et au-delà à l’être de l’homme, soit l’homme universel.

- Un homme, à travers sa femme, et au-delà, non pas à La femme universelle qui n’existe pas, mais à l’être d’une femme, qui se prête à sa jouissance comme symptôme. Lui restant à elle sa jouissance pas-toute phallique, qui n’en pâtit pas moins du ravage que lui cause le désir de l’homme.

L’homme universel, La femme universelle qui n’existe pas, sont à prendre comme symboles d’un pacte qui a une valeur sacrale.

Dans les sociétés gouvernées par le Discours du Maître, ce n’est pas pour rien, comme c’est encore inscrit dans le monde moderne mais de façon voilée, que les personnages royaux deviennent symboles du caractère fondamental de l’engagement noué au départ entre un homme et une femme. Lacan le formule ainsi :

« Le respect du pacte qui unit l’homme à la femme a une valeur essentielle pour la société entière, et cette valeur est depuis toujours incarnée au maximum dans les personnages du couple royal, qui joue. Ce couple est le symbole du pacte majeur qui accorde l’élément mâle et l’élément femelle, et il joue traditionnellement un rôle médiateur entre tout ce que nous ne connaissons pas – le cosmos et l’ordre social. Rien ne sera à plus juste titre considéré comme scandaleux et répréhensible que ce qui y porte atteinte [5] ».

Certes dans l’état actuel des relations interhumaines, la tradition est portée au second plan, plus ou moins voilée.

Il s’agit de regarder de plus près :

On prendra pour référence les données ethnographiques mise en valeur par Claude Lévi-Strauss[6].
L’intérêt principal de son ouvrage est de nous montrer comment c’est l’ordre symbolique, donc langagier — dont l’auteur affirme l’autonomie, qui surdétermine l’ordre soi-disant naturel des générations.

En effet l’inceste naturel n’existe pas.

Plus même, on le sait, pour l’utiliser dans la sélection animale de
races plus performantes, notamment dans l’élevage des chevaux de course. L’inceste naturel, ne conduit pas à la dégénérescence, comme le véhicule la doxa.

L’interdit de l’inceste est d’ordre culturel.

Il est lié aux lois de l’exogamie qui règle de façon préférentielle l’ordre des alliances et des échanges.

Cela évite au groupe social de dépérir démographiquement en se refermant sur lui-même. Le principe en est que si un homme reçoit une femme, il doit en donner une autre.

Si le père reçoit une fille pour son fils, il doit donner sa fille en échange.

Ce que démontre le livre de Lévi-Strauss, est que plus on s’approche de la structure élémentaire — celle-ci étant définie comme un ensemble d’éléments co-variants qui s’interagissent entre eux, plus les relations entre ces éléments sont complexes, différenciées et orientées.

Au contraire, plus la structure est composée de nombreux éléments, plus elle est amorphe. Dans ce cas l’imaginaire prend le pas sur l’ordre symbolique qui tend à s’abolir. D’où ces effets de groupes, de massification même, qui viennent occulter les effets de discours — toutes choses que nombre d’exemples illustent dans nos sociétés modernes.

Dans nos sociétés moderne, le choix reste toujours dirigé selon un ordre préférentiel mais qui est voilé, de sorte que l’effet de cette surdétermination de la loi est amortie. Cela entraîne cette illusion profonde, inscrite dans nos textes de loi, que n’importe qui pourrait se marier avec n’importe qui — sauf bien sûr avec un membre de la famille conjugale moderne qui est réduite à un petit groupe social. Tout cela n’est pas sans raison, ni sans effet — j’y reviendrai.

Lévi-Strauss avance que dans la structure de l’alliance, qui distingue l’ordre culturel de l’ordre naturel, la femme est l’objet d’échange, au même titre que la parole, laquelle est l’objet de l’échange originel.

À côté des sociétés patrilinéaires, il y a des sociétés matrilinéaires (dans ces cas on convoque toujours à la rescousse les Trobriandais de Bornéo contre le phallocentrisme). Or même dans ces sociétés "quels que soient les biens, les qualités, et les statuts qui se transmettent par la voie matrilinéaire, quelles que soient les autorités que peut revêtir un ordre dit matriarcal, l’ordre symbolique , dans son fonctionnement initial, est androcentrique. C’est un fait. Ce qui, bien entendu, n’a pas manqué de recevoir toutes sortes de correctifs au cours de l’histoire, mais qui n’en demeure pas moins fondamental, et nous permet en particulier de comprendre la position dissymétrique de la femme dans les liens amoureux, et tout spécialement dans leur forme socialisée plus éminente, à savoir le lien conjugal [7]".

La structure initiale du mariage a un caractère primitivement sacré, mais ce caractère est masqué dans nos sociétés, par la notion moderne de mariage par consentement mutuel.

C’est une nouveauté introduite, dit Lacan, dans la perspective d’une religion de salut donnant une prévalence à l’âme individuelle.

Ce qui s’accorde très bien avec l’homme du « moi-je » de la libre entreprise.

Cependant, même dans les sociétés soi-disant les plus avancées (les défuntes sociétés du bloc communiste et plus spécialement soviétiques) le mariage subsistait avec ses traits petit-bourgeois, alors que ces sociétés étaient fondamentalement contre ce type de modèle [8].

Aujourd’hui l’institution du mariage existe encore, certes sous une forme plus réduite et désignée par Lacan de Famille conjugale moderne. Mais elle présente certains traits si solides que les différentes révolutions ne sont pas près d’effacer, alors que d’autres traits ont disparus [9].

Historique :

Il y a à l’origine de notre civilisation marquée par le paganisme puis occidentée par la tradition romano canonique, deux types de contrat d’une nature bien différente chez les romains :

- Il y a le mariage des gens qui ont un nom, les nobles, les patriciens. C’est un mariage au caractère hautement symbolisé, assuré par des cérémonies aux rituels spécifique.

- Il y a pour la plèbe aussi une sorte de mariage fondé uniquement sur le contrat mutuel, l’union libre – ce que la société romaine appelle le concubinat.

À partir d’un certain flottement de la société romaine, le concubinat s’est généralisé et a commencer à s’établir dans les hautes sphères. Mais dans ce dernier cas, il s’agissait avant tout de maintenir l’indépendance du statut social des partenaires, pour garantir tout spécialement leurs biens propres.

Autrement dit, c’est à partir du moment où la femme s’émancipe, conquiert le droit de posséder en devenant un individu à part entière dans la société que la signification du mariage s’abrase.

Fondamentalement la femme est introduite dans le pacte symbolique du mariage en tant qu’objet d’échange. Mais, précise Lacan, non pas entre les hommes, même s’ils sont les supports de ces lignées androcentriques, mais entre les lignées, aussi bien dans les sociétés matriarcales que patriarcales.

Que la femme soit ainsi engagée dans un ordre d’échange où elle est faite objet, est ce qui fait le caractère sans issue de sa position et par là fortement conflictuelle, car l’ordre symbolique littéralement la transcende.

À cet égard, dans Tite-Live [10], il est raconté comment les femmes marquées par le vrai connubium, qui est différent du concubinat de la plèbe, ont empoisonné leur mari pendant toute une génération.

Ce n’est sans doute sans raison. Il faut donc concevoir que l’institution du mariage quand elle fonctionne pour de véritables maîtres, doit présenter quelques inconvénients liés au fait sans doute que la jouissance n’a rien à faire avec le choix conjugal.

Dans ces mariages la femme était véritablement mise en position d’objet dans un ordre symbolique et par là mise en position seconde, inhumaine.

Il y a là quelque chose d’insurmontable et d’inacceptable par rapport à cet ordre symbolique où le Dieu s’incarne dans l’homme ou le contraire.

Ce ne peut être sans conflit.

En d’autres termes si la femme n’est pas donnée à un dieu, c’est-à-dire à quelque chose de transcendant à qui elle peut se donner, alors surviennent toute sorte de dégradation, parce qu’il y à bien longtemps que l’on ne peut plus confondre l’homme avec un dieu, comme il ne peut plus supporter la figure du maître.

Dès lors s’est installé depuis belle lurette une rivalité qui ne se manifeste plus sur le plan symbolique mais dans le registre de l’imaginaire, comme dans la relation du maître et de l’esclave.

Dans la période romaine, comme en témoigne Tite-Live, a commencé la grande période de revendication voire d’émancipation des femmes sur ces bases :

« La femme n’est pas un objet de possession. Alors pourquoi l’adultère est- il puni de façon si asymétrique ? Sommes nous des esclaves ? »

De ce point de vue nos sociétés modernes n’ont pas le privilège dans ces mouvements d’émancipation des femmes – les affaires d’empoisonnement en sont la preuve la plus tangible.

Il n’empêche que dans nos sociétés modernes, celles qui favorisent l’accès le plus libre à l’acte sexuel, l’institution du mariage n’a pas tellement changé.

Cette institution repose sur le « tu es ma femme » ce qui rend presque purement formel que l’on demande à la femme si elle est d’accord [11].

Au fond, le mariage, dans sa structure même n’a pas pour but la formation d’une paire sexuelle, mais l’instauration d’un couple à définir comme producteur.

Ce que peut en dire la psychanalyse, producteur non pas de l’enfant comme effet de la fonction de reproduction, que du produit que nous avons à interroger au départ de son entrée dans l’acte sexuel, à savoir l’objet a.

L’objet a dans le désir de l’Autre qui l’antécède et qui préside non seulement à sa venue au monde comme sujet à reconnaître , mais aussi à son être biologique.

Les femmes s’échangent entre les lignées mâles.

Elles y entrent par un échange qui est celui du phallus qu’elles reçoivent symboliquement, en échange duquel elles donnent un enfant qui pour elles est un équivalent du phallus.

Elles introduisent par là dans cette généalogie symbolique, patrocentrique, et en elle-même stérile la fécondité naturelle.

Mais c’est en tant qu’elles se rattachent à cet objet unique et central qui est caractérisé par le fait qu’il n’est pas un objet, mais un objet qui est valorisé de la façon la plus radicale comme étant le phallus.

Quand on dit qu’une femme est privée du phallus, alors qu’elle ne manque de rien en réalité et surtout pas de l’organe, cette privation réelle ne prend sens que pour autant que le phallus est symbolique.

L’agent de cette privation étant imaginaire, dieu le père ou le père noël.

Dans l’amour une femme « se donne » dit-on. Pourquoi ce besoin d’affirmer ce don, alors que dans l’acte d’amour elle reçoit plus qu’elle ne donne, et en plus elle le devient ce phallus qu’elle n’a pas ?
Imaginairement, rien n’est plus captateur, dévorante que sa position.

Si cela peut se renverser dans l’affirmation qu’au contraire elle se donne, c’est dans la mesure où symboliquement elle doit donner quelque chose en échange de ce qu’elle reçoit – c’est-à-dire le phallus symbolique.

Au même titre elle se donne entre les lignées [12].

S’agissant à présent du mariage moderne par consentement mutuel, bien qu’il conserve sa signification d’être un pacte symbolique, il est entraîné sur une autre pente. Du fait principalement que la détérioration des liens sociaux les plus fondamentaux amené l’émergence de cette exigence du consentement mutuel.

Dès lors les conditions de la réalisation d’un amour idéal sont en place.

Plus il s’approche de cet idéal, plus il y a chance que se réalise une relation incestueuse, à quoi les lois de l’exogamie tentent de parer.

Même en dehors de la pratique analytique, il n’est pas rare de voir des couples dont le mari joue « l’enfant » de sa femme en l’appelant maman, celle-ci se prêtant à sa demande de soins maternels.

Lacan a pu ironiser sur le mariage d’amour comme duperie réciproque [13], la femme ne se trompant jamais dans son choix, en quoi la fonction de l’épouse n’a rien d’humain.

Comme le conflit se noue entre le pacte symbolique et l’amour, un mariage ne saurait être heureux.

L’église ne s’y trompe pas non plus puisque pour elle on se marie pour le meilleur et pour le pire.

Curieusement les mariés se séparent quand le meilleur est passé, pour éviter de consommer le pire, qui dans certains cas s’avère être le meilleur.

Il y a dans nos sociétés modernes une profonde dégradation des liens sociaux les plus fondamentaux, alors que dans les sociétés dites ethnographiques, le sujet peut se repérer dans son identité, par rapport aux lois, aux châtiments qu’il encoure s’il les transgresse, dans une très vaste constellation de mythes qui lui donne comme repérage un réseau symbolique consistant, alors que dans nos sociétés modernes le discours de la science a balayé ces mythes et rompu les liens de discours.

Pas étonnant donc que cela puisse entraîner des manifestations symptomatiques importantes que Freud met en lumière dans son ouvrage Malaise dans la civilisation.

Ces symptômes sont issus des tensions oedipiennes irrésolues, pour autant que le mythe d’Œdipe est le seul trognon de mythe à disposition du sujet pour se structurer.

Il en résulte une grande déhiscence des groupes sociaux au sein d’une telle civilisation.

Lacan va dire que c’est de cette déliquescence qu’elle est la cause de l’augmentation des psychoses.

En effet dans le monde moderne, la réduction de plus en plus étroite du groupe à la cellule conjugale a pour conséquences que le rôle formateur de plus en plus exclusif qui lui est réservé dans les premières disciplines explique l’accroissement de sa puissance captatrice sur l’individu à mesure du déclin d’un groupe social plus élargi.

L’enfant n’ayant plus que ses parents comme référence à chaque étape de sa croissance, ne disposant pas d’indentifications nouvelles.
Il en résulte pour lui une difficulté accrue d’avoir à trouver des réponses aux questions qu’il ne manque pas de se poser :

D’où vient-il, qui est-il, qu’est-ce qu’un père, que veut une femme, suis-je un homme etc. ?

C’est ce qu’analyse Freud dans son texte Le roman familial du névrosé [14], dont la thématique est reprise par Lacan dans Le mythe individuel du névrosé.

À l’examen, le groupe réduit que constitue la famille conjugale n’apparaît pas comme une simplification, mais plutôt comme une contraction complexe des relations de l’institution familiale.

Mais le rôle premier de la famille dans l’apprentissage de lalangue maternelle, ne nous oblige t-il pas à considérer que c’est la solution la moins pire, puisqu’elle est surdéterminée par la structure langagière ?

Patrick Valas [15]


[1] Lacan J. : Le moi dans la théorie de Freud et dans la technique de la psychanalyse (p. 302-306), Seuil, Paris, 1978.

[2] Proudhon, Pierre-Joseph (1809-1865) entre autres œuvres : Les principes d’organisation politique, ou la création de l’ordre dans l’humanité. 1842

[3] Étymologiquement le terme de fidélité (1330) vient du latin fides (foi), fidelitas, puis du terme médiéval féal.

[4] Lacan J. : "Fonction et champ de la parole et du langage dans la psychanalyse". Écrits, Seuil, Paris, 1966.

[5] Lacan J. : Le Moi… opus cité, p. 232.

[6] Lévi-Strauss, Claude : Les structures élémentaires de la parenté. PUF, Paris 1949.

[7] Lacan J. : Le Moi… opus cité p. 303

[8] Lacan J. : "L’objet de la psychanalyse", leçon du 14 nov. 1965 p 3 (inédit)

[9] Lacan J. : Le Moi… opus cité p, 304

[10] Tite-Live, Né en 59 av. J.C. mort en 17 de notre ère. Son Histoire romaine est en grande partie disparue.

[11] Lacan J. : "La logique du fantasme". Leçon du 14 juin 1967 (inédit).

[12] Lacan J. : La relation d’objet. P. 154. Seuil, Paris, 1994.

[13] Lacan J. : Les non-dupes errent. 13 nov. 1973 (non publié)

[14] Freud S. : Le roman familial du névrosé, 1907, traduction française, Paris, P.U.F, Névrose, psychose et perversions. 2002

[15] Valas P. : Intervention à l’invitation du forum de Bordeaux de l’EPFCL. 14 janvier 2005.


Commentaires  Forum fermé

Logo de Daniel Pendanx
La famille conjugale moderne. Du nouveau en 2013 : le mariage pour tous ?
vendredi 15 février 2013 à 19h06 - par  Daniel Pendanx

Cher Patrick,

Lisant tes quelques lignes réintroduisant cette intervention sur “la famille conjugale moderne” , il m’a semblé que tu te prêtais là, un peu d’ailleurs contre l’esprit général de ton propos, à cette disons facilité ou réduction théorique sur la base de quoi je vois le « lacanisme » se constituer comme un discours (avec sa dogmaticité et ses propres « figures », sa dimension normative irréductible) qui au final vient entretenir, culturellement et politiquement entretenir, l’avenir de l’illusion – toute l’actualité (confusionnelle) de l’anti-doxa. Je vais essayer de m’en expliquer.

Le déchaînement présent du groupe millerien, avec son agit-prop. permanente (journal ” Quotidien Lacan” s.v.p., meeting avec compagnons de route et v.i.p. du Spectacle, pétitions, publication), est la pointe extrême de cela, y scotchant bien des suiveurs.

D’aucuns, perplexes, relevaient récemment lors d’un colloque (concernant le travail social de la protection administrative et judiciaire de l’enfance) : plus il y a de réparateurs plus il semble y avoir de pannes… Et puis Le Monde titrait sur le naufrage de la Protection Judiciaire de la Jeunesse. Oui, la production des Dépanneurs, au service du positivisme éducatif, du thérapeutisme – un positivisme qui vise à contourner sinon à réduire le rapport au réel, à l’impossible, participe du problème… Le problème, éternel, du « malaise » dans l’éducation, la transmission de la Loi n’est-ce pas. [Moi je suis par exemple depuis longtemps, face à ce positivisme qui entretient la dite “perte des repères”, ne serait-ce qu’au titre de la dénoncer, pour deux mesures révolutionnaires phares : 1) fin des formations universitaires de « psychologues » (imagine un peu comment une telle proposition peut-être reçue aujourd’hui !), et 2) ne plus faire des juges des enfants les juges de l’Assistance éducative. Et là je sais, pour être bien placé, pourquoi, de celle-ci, nul n’en veut. Tous tiennent tant au juge, au juge non juge s’entend , et le juge lui-même si peu au juge-interprète ! L’homoparentalité institutionnelle, nous y sommes depuis si longtemps dedans. L’affaire du « mariage gay », c’est la cerise sur le gâteau, comme une dernière pierre à l’édifice.]

Concernant le dit naufrage des repères – et “naufrage” il y a (mais l’ancien temps avait ses propres folies !) – il conviendrait, si tout du moins on prétend à une position d’interprète, ne serait-ce que vis-à-vis du législateur et de ses concitoyens – d’aborder les choses dans une toute autre rigueur et liberté. Mais voilà qui exige de soutenir une voie qui ne soit pas d’orgueil (d’orgueil éducatif et thérapeutique, d’orgueil politique, soit-il « psychanalytique ») , une voie, comme disait aussi notre bon Freud, entre Charybde et Scylla : entre le Charybde du vieux juridisme (ou familialisme social) et le Scylla de l’anti-œdipisme, de l’anti-doxa.

Mais je veux d’abord ici rapporter, marquant très vite le chemin de réflexion qui m’a engagé dans la voie où je suis aujourd’hui, et par là faire peut-être mieux entendre mon propos, qu’il y a eu un temps de ce trajet, temps maintenant quelque peu lointain, où m’extirpant du psychologisme (de cette idée par exemple que pour qu’il y ait du tiers, du père, dans une famille, il fallait injecter du père concret, un tiers concret dans la scène du cas), commençant à me saisir du fait que la mise en œuvre du nom-du-père, de l’espace de séparation, de la fonction paternelle, pouvait être le fait « d’un-père » de quelque sexe soit-il (cf. Lacan dans les Ecrits), j’en étais venu à penser que les couples de même sexe (la réflexion portait alors sur ce qui se passait chez nos amis suédois, toujours en avance n’est-ce pas), pouvaient être légitimés sans encombre… Ma vie, ma propre expérience de praticien, mon chemin d’élaboration et de pensée, l’apport des Legendre, m’ont porté à me saisir du lien intrinsèque de la subjectivation (de la sublimation de l’Œdipe) avec les fictions institutionnelles, les montages du Droit : j’ai alors compris qu’il s’agissait, non de révolutionner et de déconstruire les montages, mais, comme du père, ainsi qu’on le prête à Lacan, il faut savoir s’en servir. Mais on n’apprend à s’en servir que si l’on se saisit du fait, du fait symbolique, je résume et simplifie, que du tiers il n’y a que tiers exclu , et que de cela, en regard de la logique du fantasme (logique d’indifférenciation et de “meurtre”), le Droit (et l’institutionnalité) doivent être comptables - sinon à verser vers une forme ou une autre de tyrannie.

Maintenant, mes remarques ; celles-ci, données à l’état brut, portent donc sur les deux lignes suivantes de ton introduction récente :

« Homme ou femme, après tout ne sont que des signifiants, dont se déduit qu’il y a un impossible à savoir sur le sexe.
A cet égard, les formules de la sexuation, signifient que le sujet fait le choix (surdéterminé) de son identité sexuée, indépendamment de son sexe anatomique. »

Les mots mère et père ne sont pas de purs signifiants, disons poétiques, flottants au gré du désir, ni davantage, l’un ou l’autre, un signifiant absolu, tel le Phallus ou le Totem.
Au titre du signifiant ils s’inscrivent donc dans ce lien constitutif du mot qui unit le signifiant au signifié, soit, comme y est souvent revenu Legendre dans ce « lien constitutif de la dette du mot, par laquelle le sujet parlant s’inscrit dans l’institution du langage ; … » (cf. note p.149 de Dieu au miroir) .

Poser que homme ou femme “ne sont que des signifiants” », qui seraient au fond comme à disposition du sujet (lequel choisirait, comme dans la transsexualité), c’est hypostasier le signifiant, le surinvestir, en le désarrimant de la structure ternaire du mot : signifié / (écart) / signifiant. Et c’est dès lors s’engager peu ou prou dans la voie (normative occulte) du sujet libre de son choix, le sujet postmoderne, auto-fondé.

Tu prends toutefois, toi, la précaution d’indiquer entre parenthèses que ce choix est surdéterminé ; oui, mais “surdéterminé” par quoi ? Je dirai de mon côté, tout autant surdéterminé par le discours familial dans lequel il est advenu que surdéterminé par l’ordre du signe, de légalité du signe (du lien de dette du signifiant au signifié, de la « loi du langage ») qui institue le sujet à sa place de droit.
C’est dans ce désarrimage du signifiant à l’ordre légal du signe, du mot, que le bât blesse dans le « lacanisme ». Mais cette proposition (soulignant une faille présente déjà, je le pense avec Legendre, dans l’orientation de Lacan) ne me fait pas négliger l’autre travers (garde toi à gauche, garde toi à droite mon frère) : celui de la réduction du signifiant sur le signifié (concomitante à la réduction du mot sur la chose) – réduction des registres qui est celle de tout “familialisme”, de toute conception objectiviste de la famille, celle là même qui sous-tend d’ailleurs la supposée famille monoparentale.
Je le répète : il n’y a pas de famille monoparentale, mais des familles mono-linéaires, ce qui est tout autre chose. Et nous faire croire qu’il y a famille homoparentale, légitimer en droit cela – autrement dit réduire, et c’est là le point commun de tant de discours apparemment opposés, la famille pour l’animal parlant à la nature ou au social – ouvre aux nouvelles dé-symbolisations… Ce qui est, sous les grandes proclamations de "l’amour" et de "l’égalité", promouvoir la nouvelle folie politique.

[J’ai insisté sur le forum du site Oedipe, semble-t-il dans le désert, et plus encore, en levant grande hostilité pour ce crime de lèse-majesté universitaire, sur le fait que les analystes soient aujourd’hui à la traîne de l’anthropologie sociale (Héritier, Godelier), qu’ils préfèrent celle-ci, et pour quelle Cause ?, à l’anthropologie dogmatique… Il conviendrait pourtant de reprendre cette affaire : montrer, dans le fil de ce que Lacan en a ouvert dans sa critique de la « sociologie environnementale”, combien les conceptions objectivistes de la sociologie ont continué d’infiltrer les milieux de la psychanalyse. Quand je pense que des analystes prennent au sérieux par exemple les confusions de registres récurrentes d’Irène Théry, ou, sans autre réplique, le comparatisme "social" et "sexuel" entre les bonobos et nous, de Godelier ! Etc. ]

Dès lors que l’écart du signifiant au signifié est préservé, il y a du « jeu », du jeu possible avec les mots bien sûr, mais cet écart, ce jeu, ils n’existent que d’une liaison, et que d’un certain « ordre » (l’ordre que Lacan avait en vue, ainsi que le rappelle Melman dans le propos que j’ai rapporté dans mon texte Le mariage gay, les pétitions et l’interprète).

Chaque figure fondatrice (mère ou père), pour relever de cet ordre (de la loi du langage), et plus précisément encore, de la structure ternaire même du signe (signifié/signifiant) – en laquelle s’implique le lien de légalité, de dette, du signifiant au signifié –, chaque figure oppose à tout sujet, au fantasme de tout sujet, en tant que telle, le mur de cette première institution qu’est le langage, le mur, dira Legendre, de la dogmaticité : c’est le mur de l’institution des images (Dieu au miroir, p.148 et ss.) – mur qui soutient ce qu’on nomme Interdit. A charge pour les interprètes, dans leur propre œuvre « parentale » médiane, sur des plans distincts (dont celui, spécifique, mais rattachable à l’œuvre « parentale » médiane générale, de l’analyste) de faire valoir cet Interdit – soit l’écart, l’espace de séparation entre le signifiant et le signifié, entre les figures elles-mêmes –, en en payant d’abord pour eux-mêmes le prix subjectif. A partir de quoi le sujet rencontre les conditions d’entrée, pour son propre compte de sujet, dans la dialectisation-subjectivation de l’écart, de la « séparation », celle de son rapport, toujours boiteux, au Réel.

Chaque figure (Mère ou Père), relevant de la loi du langage, du lien de dette du signifiant au signifié [lien de dette qui s’ordonne à ce le lien de dette homme-père, mère-femme dont le noyau du droit civil a été jusqu’à ce jour comptable], renvoie le sujet à ce dont justement le langage le coupe, le sépare : du reflet de lui-même et de l’opacité de ce que nous appelons “nature”.

Une figure n’existe (dans le champ normatif du principe de Raison, de contradiction, du tiers exclu) que dans la distinction et la liaison de l’autre figure, que celle-ci soit incarnée ou non ! Et de ce fait toute figure, dès lors qu’elle est soutenue, habitée en tant que telle (= en tant que figure symbolique) par le sujet, participe, dans la scène de la représentation fondatrice, de l’institution de l’écart, soit de la coupure, de la séparation. Ce qui permet de dire par exemple qu’une mère et son enfant, dès lors qu’ils se trouvent par l’état civil référés l’un et l’autre, de leur place, à une même fiction fondatrice, non faussée [fiction dont le rite du mariage a vocation à être comptable, pour les mariés comme pour les non mariés] - cet enfant étant ainsi lié, pour son propre compte de sujet, à la catégorie du père, soit-elle celle, ultime, du père inconnu, catégorie qui ne saurait être à disposition, comme tout y tend, du "désir" de la mère - et dès lors que la mère se trouve conviée en droit à habiter subjectivement son propre lien de ligne, c’est déjà une famille, pas une famille décomplétée, monoparentale  !

Une figure parentale n’existe comme telle (comme fiction distincte et liée) que nouée dans un rapport d’ordre (langagier, de légalité) avec une autre figure : dans ce rapport dissymétrique au Phallus qu’est celui de la différence des sexes. Dès lors qu’une figure existe comme telle, autrement dit, dès lors qu’un parent est référé (à l’axe phallique, selon son sexe), l’autre figure parentale existe comme telle aussi, que l’autre parent soit présent ou absent.

C’est de cette existence là, de ce rapport là entre les figures parentales, dont la culture et le droit sont comptables, que dépend, comme disait Lacan, le sort psychologique de l’enfant, que dépendent les conditions du procès subjectif de distinction de soi et de soi-même , de soi et de l’autre, l’autre en soi.

C’est de ce "rapport entre les figures", de ce cadre de représentation, noué au Grand Autre (à la Référence totémique), dont tout interprète, et donc également tout analyste, non seulement tire sa légitimité dans le transfert, mais est comptable.

Pour reprendre un propos sensible d’Eva Talineau (que je remercie là de sa lecture et du rebond à mon texte), très approprié à mes yeux pour aborder la responsabilité politique (je n’ose dire "éthique") des analystes et autres interprètes, je dirai qu’il s’agit en effet de savoir de quoi, par rapport à une telle affaire, les interprètes sont "comptables". Je dis que nous sommes comptables de "dire" quel est le cadre qui nous fonde comme interprète, autrement dit comptables de dire et de témoigner de la symbolisation des figures qui nous fonde à "s’autoriser que de soi-même", ou comme disait Winnicott, "d’être sa propre figure parentale"… C’est bien de saisir (ainsi que tout mon parcours m’y a conduit) ce qu’il en est des fondements généalogiques-juridiques de la clinique - du mythe et du cadre de la représentation “oedipienne” (“cadre de légalité de la clinique”) qui fondent et légitiment toute pratique d’interprète -, que nous pouvons intervenir en raison, et en interprètes, dans cette affaire dite du “mariage pour tous”. C’est d’abord de cela, de cette exigence d’une fiction fondatrice équilibrée, non faussée, symbolique - à laquelle chacun, en regard de ses surdéterminations, familiales, culturelles, se rapporte comme il peut - , que nous avons à répondre dans la Cité, même si c’est une exigence difficile à tenir .

Difficile car nous touchons là tout à la fois 1) à la position de l’interprète dans la Cité, ou plus exactement, à la position de l’interprète dans le mythe institutionnel œdipien [tu as cher Patrick notait de ton côté, comme je l’avais indiqué sur le forum du site Œdipe, que « cette revendication « mariage pour tous » est la confirmation de la valeur absolue de la « famille conjugale moderne » , autrement dit, de la valeur générique, absolue, toujours aussi actuelle (non réductible à je ne sais quelle viennoiserie ou ancien temps !, du mythe œdipien qui sous-tend cette représentation de la « famille conjugale moderne », et 2) difficile parce que la distinction et l’articulation des registres, l’articulation du jeu des identifications inconscientes aux catégories juridiques, langagières de la Filiation, aux montages du Droit, restent aujourd’hui pour le moins sous-investie, incomprises. Ce dont témoigne la façon dont le propre apport d’Alexandra Papageorgiou-Legendre (dans Filiation, Leçons IV), sur les fondements généalogiques de la psychanalyse, est mis sous le boisseau, non lu, non discuté… Sinon dans quelques propos caricaturaux.

J’en reste là, te remerciant de l’occasion offerte de creuser tranquillement une controverse, certes difficile, mais d’autant plus difficile qu’il devient impossible de la soutenir hors ces enjeux de communauté, inavouables, qui semblent aujourd’hui commander les analystes. Des enjeux pourtant forts “visibles”, tout du moins à l’interprète et au fou, au fou du Roi-Sujet, of course.

Amicalement,

Daniel Pendanx

Logo de Sixto Quesada
La famille conjugale moderne & la langue m/paternelle
dimanche 9 janvier 2011 à 15h38 - par  Sixto Quesada

Oui. Tout ça est fort convaincant… N’était que, partant de ce que le signifiant étant irréductiblement amarré à son image de signfié qui le mène par le bout du nez, tout peut se dire, et aussi son contraire.

Reste que la langue —ou lalangue, peu importe— dite maternelle n’est pas une langue mais un dialecte : le dialecte domestique, soit les babioles de maman et la connivence sématique. La langue, c’est la langue paternelle, en ceci qu’elle prend corps des contraintes arbitraires portées à la première, la maternelle, ce qu’on appelle la grammaire.